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Le cautionnement hypothécaire et l’application de l’article 449 de l’AUSCGIE Commentaire de l’arrêt de la CCJA n° 076/2017 du 30 mars 2017

Le cautionnement hypothécaire et l’application de l’article 449 de l’AUSCGIE

Commentaire de l’arrêt de la CCJA n° 076/2017 du 30 mars 2017

Par Me Noël Kossi Assiom BOKODJIN

Avocat au Barreau du Togo

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Résumé

Il n’est a priori pas évident de voir un lien entre la nature réelle ou personnelle du cautionnement hypothécaire et l’exigence de l’autorisation préalable du conseil d’administration, pour les garanties souscrites par la société anonyme en sûreté des engagements pris par des tiers. Mais en retenant, par l’arrêt TORICAF du 30 mars 2017, que l’affectation par une société anonyme de bien immeuble en garantie de la dette d’autrui, par des actes intitulés « cautionnement hypothécaire », est un cautionnement soumis à l’autorisation préalable du conseil d’administration prévue à l’article 449 de l’AUSCGIE, la CCJA admet implicitement l’idée d’un tel lien. Ce qui apparait comme une réduction  de la portée de ce texte qui a plutôt vocation à s’appliquer à toutes les sûretés indépendemment de leur nature. Par ailleurs, si la méthode de qualification du contrat adoptée par les juges dans cette décision parait insuffisante en ce qu’elle ne permet pas de vérifier la réelle intention des parties, la solution a, néanmoins, le mérite d’annoncer une inflexion de la jurisprudence de la Cour sur la nature du cautionnement hypothécaire.

 

L’arrêt

Arrêt n° 076/2017 du 30 mars 2017

BOA-CI C/ TORICAF S.A.

« La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 30 mars 2017 :

Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 12 mars 2015 sous le n°040/2015/PC et formé par maître Mohamed Lamine FAYE, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la société Bank Of Africa Côte d’ivoire, en abrégé BOA-CI, ayant son siège social à Abidjan-Plateau angle avenue Terrason de Fougères et rue Gourgas, 01 BP 4132 Abidjan 01, représentée par Monsieur KHALID LYOUBI, son directeur général par intérim, demeurant ès-qualité au siège social de ladite société, dans la cause l’opposant à la société Torréfaction Ivoirienne de Café, en abrégé TORICAF, dont le siège social est sis à Abidjan, quartier VRIDI, zone industrielle, rue du textile, 15 BP 1134 Abidjan 15, représentée par son président directeur général monsieur KHALIL Rami, ayant pour conseil Maître KAMIL Tarek, avocat à la cour, en cassation de l’arrêt n° 497 rendu le 25 juillet 2014 par la cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ;

En la forme :

Déclare la Société TORREFACTION IVOIRIENNE DE CAFE dite TORICAF recevable en son appel relevé du jugement numéro RG 101 rendu le 13 Mars 2014 par le Tribunal de Commerce d’Abidjan ;

Au fond :

L’y dit bien fondée ;

Infirme le jugement querellé en ce qu’il a débouté la Société TORICAF de son action en annulation des actes de cautionnement hypothécaire et en mainlevée d’hypothèque ;

Statuant à nouveau sur ce point ;

Dit et juge que les actes de cautionnement hypothécaire souscrits par le Président Directeur Général sans l’autorisation préalable donnée par le Conseil d’Administration sont nuls et de nul effet ;

Ordonne en conséquence la mainlevée des hypothèques prises par la BOA-CI le 05 Mars 2010 sur l’ensemble des biens et droits immobiliers de la Société TORICAF SA ;

Ordonne à Monsieur le Conservateur de la Propriété Foncière et des Hypothèques de radier lesdites hypothèques ;

Condamne  la Société BOA-CI aux entiers dépens. » ;

Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation, articulé en deux branches, tel qu’il figure à sa requête annexée au présent arrêt ;

Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ;

Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’entre 2002 et 2006, par actes notariés, la BOA-CI et la société PRONIBEX-CI SARL, représentées par leurs représentants légaux, concluaient plusieurs conventions de financement à la garantie de l’exécution desquelles la société TORICAF-SA, représentée par son président directeur général Monsieur KHALIL Rami, également gérant de la société PRONIBEX-CI, se constituait caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble sis à Abidjan, zone industrielle de VRIDI, rue du textile, formant le lot numéro 416B, d’une superficie totale de 15.788 m2 ; que par jugement civil n° 176 du 14 février 2013, la société PRONIBEX-CI SARL a été admise à la liquidation ; que pour recouvrer le montant de sa créance, la BOA-CI avait fait servir le 22 novembre 2013 un commandement aux fins de saisie immobilière à la société TORICAF-SA, pour un montant de 4.476.800.000 FCFA représentant son engagement au titre de caution hypothécaire de la société PRONIBEX-CI SARL ; que la société TORICAF-SA, contestant les actes de cautionnement produits par la BOA-CI, assignait en annulation de cautionnement la BOA-CI devant le tribunal de commerce d’Abidjan ; que par jugement RG n°101 du 13 mars 2014, ledit tribunal déboutait cette demande ; que sur appel de la société TORICAF-SA, la cour d’appel d’Abidjan rendait l’arrêt infirmatif n° 497 du 25 juillet 2014, objet du présent pourvoi en cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi pris en ces deux branches réunies ;

Attendu que la BOA-CI fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par une fausse interprétation de l’article 449 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE), d’une part, au regard des dispositions de l’article 465 dudit Acte uniforme, motif pris de ce que, ladite cour d’appel, a assimilé les sûretés consenties par la société TORICAF, par affectation de droits réels immobiliers, à des cautionnements en violation de l’article 449, en déniant au président directeur général d’une société anonyme le pouvoir de direction générale de la société et de représentation de celle-ci dans ses rapports avec les tiers en violation de l’article 465 de l’Acte uniforme précité ; que d’autre part, la BOA-CI allègue, la violation de l’article 449 susvisé, compte tenu des articles 2 à 38 et 117 à 131 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, motif pris de ce que le juge d’appel s’est limité à une analyse littérale et inappropriée de l’article 449, sans se référer aux dispositions pertinentes de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés qui distingue deux catégories de sûretés à savoir les sûretés personnelles et les sûretés réelle ; sauf à rajouter à la loi, cette catégorie de sûretés, dont relève l’affectation hypothécaire d’un bien immeuble, tel qu’en l’espèce, n’est nullement visée par la disposition de l’article 449 précité exigeant l’autorisation préalable du conseil d’administration de la société et conclut à la cassation de l’arrêt entrepris de ce chef ;

Mais attendu, d’une part, qu’aux termes de l’article 12, alinéa 1er de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés du 17 avril 1997, « La caution peut garantir son engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens. » ;

Attendu, en l’espèce, que la société TORICAF-SA n’est intervenue dans la conclusion des conventions de financement dont l’exécution est poursuivie qu’en qualité de caution, en cantonnant sa garantie à l’affectation en hypothèque de premier rang de son immeuble sis à VRIDI et objet du titre foncier n°416B ; qu’ainsi, ne viole en rien la loi la cour d’appel qui, faisant application dudit article 12 de l’Acte uniforme suscité, a qualifié lesdits actes de cautionnement ;

Attendu, d’autre part, qu’aux termes des dispositions impératives de l’article 449, alinéa 1er de l’Acte uniforme précité, « Les cautions, avals, garanties et garanties à première demande souscrits par la société pour des engagements pris par des tiers font l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration. » ; qu’en l’espèce, il n’est pas contesté que les actes de cautionnement litigieux n’ont été signés que par le président directeur général sans l’autorisation du conseil d’administration ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel d’Abidjan a fait une saine application de l’article 449 de l’Acte uniforme suscité en annulant lesdits actes qui n’ont pas été autorisés par le conseil d’administration et n’a en rien commis la violation alléguée des articles 465 de l’Acte uniforme précité et des articles 2 à 38 et 117 à 131 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés ; qu’il échet en conséquence de déclarer le moyen non fondé et de le rejeter ;

Attendu que la société BOA-CI, ayant ainsi succombé, doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement après en avoir délibéré ;

Déclare recevable le pourvoi introduit par la société BOA-CI, en la forme ;

Au fond, le rejette comme non fondé ;

La condamne aux dépens. »

 

Note

Exposer Akoélé pour couvrir Akoko[1] est une tentation à laquelle succombe souvent le dirigeant social qui a les rênes de deux sociétés différentes. La pratique la plus courante consiste à faire garantir par l’une, les dettes de l’autre. A cette fin, le cautionnement, l’hypothèque ou les deux à la fois sont, entre autres, les sûretés auxquelles il a souvent recours  et parfois, sans l’autorisation du conseil d’administration de la société garante. L’arrêt rendu le 30 mars 2017 par la haute juridiction de l’espace OHADA l’illustre parfaitement bien. Il porte sur le cautionnement hypothécaire consenti au profit d’un tiers par une société anonyme sans autorisation du conseil d’administration.

En voici les principaux éléments factuels. Entre 2002 et 2006, par actes notariés, la BOA-CI et la société PRONIBEX-CI SARL, prises chacune en la personne de  son représentant légal, concluaient plusieurs conventions de financement à la garantie de l’exécution desquelles la société TORICAF-SA, représentée par son président directeur général, également gérant de la société PRONIBEX-CI, se constituait caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble sis à Abidjan. Par jugement du 14 février 2013, la société PRONIBEX-CI SARL a été admise en liquidation. Pour recouvrer sa créance, la BOA-CI  fait servir le 22 novembre 2013 un commandement aux fins de saisie immobilière à la société TORICAF-SA, pour un montant de 4.476.800.000 FCFA représentant son engagement au titre de caution hypothécaire de la société PRONIBEX-CI SARL. La société TORICAF-SA oppose, à la BOA-CI, le défaut d’autorisation de son conseil d’administration pour contester la validité des actes de cautionnement dont s’agit. Un litige nait.

La société TORICAF porte ce différend devant le Tribunal de commerce d’Abidjan par une assignation de la BOA-CI en annulation des cautionnements et en mainlevée d’hypothèque. Par jugement du 13 mars 2014, ledit Tribunal déboutait la TORICAF S.A. de ces demandes.  Sur appel de cette dernière, la Cour d’appel d’Abidjan rendait l’arrêt infirmatif n° 497 du 25 juillet 2014, objet du pourvoi formé par la BOA-CI devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’OHADA[2], qui rend l’arrêt que nous commentons.

Devant les juges du fond, la société TORICAF soutenait que les  sûretés souscrites en garantie de la dette de la société PRONIBEX-CI Sarl au profit de la BOA-CI sont des cautionnements soumis, pour leur validité, à l’autorisation préalable du conseil d’administration suivant l’article 449 de l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et au Groupement d’Intérêt Economique (AUSCGIE). Or, en l’espèce, cette autorisation fait défaut. Ces actes doivent, en conséquence, être déclarés nuls. A l’opposé, la BOA-CI estime que les garanties en jeu sont des sûretés réelles exclues, selon elle, du champ d’application de l’article 449  applicable uniquement au cautionnement et aux autres sûretés personnelles. Le Président Directeur Général de la société, en vertu de son pouvoir de direction générale et de représentation de celle-ci qu’il tient de l’article 465 de l’AUSCGIE peut, ainsi, valablement signer ces contrats et engager la société à l’égard des tiers, sans une quelconque autorisation du conseil d’administration.

Cette thèse n’emporte pas la conviction de la Cour d’appel d’Abidjan qui fait le raisonnement suivant dans l’arrêt rendu le 25 juillet 2014. L’article 12 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés[3] (AUS) permet qu’une caution affecte un bien meuble ou immeuble en garantie de son engagement de caution, consenti en sûreté de la dette du débiteur. En l‘espèce,  la société TORICAF S.A. n’est intervenue dans la conclusion des conventions de financement dont l’exécution est poursuivie qu’en qualité de caution, en cantonnant sa garantie à l’affectation en hypothèque de premier rang de son immeuble. Dès lors, les actes ainsi conclus sont des cautionnements soumis à l’autorisation préalable du conseil d’administration en vertu de l’article 449 de l’AUSCGIE. Le défaut de celle-ci expose donc lesdits actes à la nullité. Elle les déclare ainsi nuls et de nuls effets et ordonne, en conséquence, la mainlevée d’hypothèque, faisant partir en fumées les chances de la BOA-CI de recouvrer une créance de quatre milliards et demi de FCFA.

Les débats tels qu’ils ont été menés obligeaient les juges à répondre  à la question de la nature juridique des engagements en cause. Y avait-il cautionnement ? S’agissait-il d’une pure sûreté réelle pour autrui ? Quelle est la nature du cautionnement hypothécaire ? De la réponse à cette question semblait dépendre l’application des dispositions de l’article 449 de l’AUSCGIE. La question de l’exigence ou non de l’autorisation préalable du conseil d’administration semblait en effet sous-jacente, ainsi que le soutenait le pourvoi, à celle de la nature des engagements souscrits[4].

Après avoir visé l’article 12 alinéa 1  de l’AUS du 17 avril 1997, la haute juridiction de l’OHADA décide que c’est à bon droit que la Cour d’appel a qualifié les actes en cause de cautionnement. Elle ajoute que par conséquent, dès lors qu’il n’est pas contesté que ces actes n’ont été signés que par le Président Directeur Général sans l’autorisation du conseil d’administration, l’article 449 de l’AUSCGIE devait recevoir application. Ce qui emporte la nullité desdits actes.

Cette décision approuvée par certains auteurs[5] a, d’une part, le mérite de relancer le débat sur la nature, en droit OHADA, du cautionnement hypothécaire[6]. En effet, alors que par un arrêt du 27 octobre 2016 de la même CCJA[7], il a été clairement décidé que le cautionnement hypothécaire est une sûreté réelle, la présente décision semble venir calmer les ardeurs des tenants de la thèse réaliste de cette sûreté[8]. La question mérite d’autant plus d’attention que dans la pratique, ils sont légion ces contrats de crédit rédigés par des professionnels en la matière, en l’occurrence des notaires, qui contiennent des clauses parfois aussi floues qu’ambigües. Quand on sait que l’efficacité d’une sûreté ne se mesure que dans sa capacité à être réalisée sans trop de complications et à permettre aux banques de recouvrer leurs créances, il est d’une importance vitale, pour l’économie même de nos Etats, que ces contrats soient rédigés avec la plus grande clarté possible.

D’autre part, cet arrêt permet de mener la réflexion sur la portée de l’article 449 de l’AUSCGIE et de déterminer ainsi l’étendue des actes soumis à l’autorisation préalable du conseil d’administration. Il constitue enfin une illustration de la complémentarité entre le Droit des sûretés et le Droit des sociétés. Les Juges ont en effet fait asseoir leur raisonnement sur les règles du Droit des sûretés avant d’aboutir à une conclusion avec l’application du Droit des sociétés. En d’autres termes, c’est la nature juridique du cautionnement hypothécaire qui a déterminé la CCJA à retenir la nécessité de l’autorisation préalable du conseil d’administration pour la validité des contrats en cause.

Nous verrons, à l’analyse, que cette démarche était peu nécessaire. L’application de l’article 449 de l’AUSCGIE à ces contrats (II) ne devrait pas, pour ainsi dire, être tributaire de la nature réelle ou personnelle du cautionnement hypothécaire (I).

                                                  

                 I- La nature du cautionnement hypothécaire

Le cautionnement réel est-il réellement un cautionnement ? Se demandait déjà, il y a près de deux décennies, Philippe BONNET[9]. Cette question a pendant longtemps défrayé la chronique et divisé la doctrine en droit français[10], avant que l’ordonnance du 23 mars 2006 portant réforme du droit des sûretés ne vienne clore le débat[11]. C’est la même question qui s’est posée aux juges, dans l’espèce qui nous intéresse. Lorsqu’une personne est désignée, dans un contrat de crédit, comme caution, en affectant en garantie de la dette d’autrui un bien immeuble spécifié au contrat et auquel son engagement est limité, sommes-nous en présence d’un cautionnement ou d’une sûreté réelle ? La CCJA, adoptant les motifs de la Cour d’appel d’Abidjan, a opté pour le cautionnement (B), excluant toute idée de sûreté réelle, pourtant admise il y a peu (A).

 

A-     Le cautionnement hypothécaire n’est plus une sûreté réelle

Le cautionnement, sûreté personnelle par excellence, est défini comme le contrat par lequel une personne, appelée caution, s’engage envers le créancier à payer la dette du débiteur, au cas où celui-ci n’y satisferait pas lui-même[12]. Selon l’article 13 de l’AUS du 15 décembre 2010, c’est « un contrat par lequel la caution s’engage envers le créancier qui accepte, à exécuter une obligation présente ou future contractée par le débiteur, si celui-ci n’y satisfait pas lui-même »[13]. Cette sûreté fait naitre un droit de créance au profit du créancier contre la caution, permettant au premier d’avoir, comme gage de recouvrement de sa créance, le patrimoine de la seconde, en plus de celui du débiteur principal.

Quant à l’hypothèque, c’est « l’affectation d’un immeuble déterminé ou déterminable appartenant au constituant en garantie d’une ou plusieurs créances, présentes ou futures à condition qu’elles soient déterminées ou déterminables»[14]. Ici, le lien de droit créé par cette sûreté est purement réel. Il s’agit d’un droit de suite et de préférence[15] du créancier sur le bien donné en garantie. Aucun droit personnel contre le constituant ne nait au profit du créancier.

Cette différence de nature entre sûretés réelles et sûretés personnelles peut laisser croire à l’impossibilité d’une combinaison de ces deux techniques de garantie. La pratique des affaires a pourtant très tôt démontré le contraire. Les établissements de crédit, à la recherche d’efficacité des garanties souscrites par les emprunteurs, ont en effet imaginé des formules combinant plus ou moins sûretés personnelles et sûretés réelles[16]. L’une de ces formules est le cautionnement hypothécaire.

Comme c’est le cas dans la présente espèce, une personne appelée caution affecte, en garantie de la dette du débiteur, un bien immeuble, en hypothèque. Ici, la société TORICAF S.A. a affecté, en garantie de la dette de la PRONIBEX-CI Sarl, son immeuble. Sans rapporter in extenso, le contenu de la clause de garantie, l’arrêt révèle cependant que la TORICAF s’est constituée « caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble sis à Abidjan… ».

En retenant qu’il s’agit, en l’espèce, de cautionnement, la CCJA, à la suite de la Cour d’appel d’Abidjan, a rejeté la lecture de la BOA-CI consistant à voir dans ces engagements des sûretés réelles.

Et pourtant, cette lecture n’était pas si impertinente. En effet, la garantie consiste ici en l’affectation en hypothèque par la TORICAF S.A. de son immeuble. Elle s’est constituée « caution hypothécaire » certes. Mais comment ? « Par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble… ». La formule employée peut laisser croire que ce qui constitue la garantie, c’est en réalité cette affectation en hypothèque de l’immeuble. Aucun engagement personnel ne transparait, si ce n’est par la référence aux termes « caution » et « cautionnement ». Le seul emploi de ces termes suffit-il alors à ranger l’opération dans la case des sûretés personnelles ? La réponse négative nous semble plus adéquate, surtout qu’aux termes de l’article 4 de l’AUS de 1997, le cautionnement ne se présume pas, il doit être exprès[17].

La réponse de la CCJA peut être d’autant plus surprenante que pratiquement dans les mêmes circonstances de fait, à peine six (06) mois avant l’arrêt commenté, elle avait retenu la solution inverse. Il s’était agi, tout comme en l’espèce, de déterminer la nature d’un engagement par lequel une personne « se constituait caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble » en garantie de la dette du débiteur. Le tiers engagé était un illettré et a assigné la banque en annulation de l’engagement, pour manquement à l’exigence de la présence des témoins certificateurs de la caution illettrée prévue à l’article 4 alinéa 3 de l’AUS du 17 avril 1997 reprise à l‘article 14 alinéa 2 de l’AUS de 2010[18]. La réponse de la Cour était claire et nette : « Mais attendu que l’article 4 alinéa 3 de l’Acte uniforme précité, dont la violation est invoquée, traite de la formation du cautionnement, sûreté personnelle, alors qu’en l’espèce la sûreté dont la réalisation est entreprise est une sûreté réelle ; que cet article ne pouvant s’appliquer à la sûreté réelle, il y a lieu de rejeter également cette dernière branche du moyen unique comme étant non fondé »[19]. La CCJA a donc qualifié le cautionnement hypothécaire dans cet arrêt de sûreté réelle.

C’est la même solution que la Cour de cassation française avait fini également par retenir après plusieurs atermoiements[20]. L’arrêt le plus retentissant sur la question reste celui de la chambre mixte du 2 décembre 2005[21]. Par cette décision, la Cour retient qu’  « une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d’un tiers n’implique aucun engagement personnel à satisfaire à l’obligation d’autrui et n’est pas dès lors un cautionnement, lequel ne se présume pas ». L’article  2334 du Code civil français consacrera cette solution à la faveur de la réforme apportée par l’ordonnance du 23 mars  2006[22].

La BOA-CI croyait ainsi pouvoir attirer les Juges dans le même raisonnement. Mais, ce fut peine perdue, la CCJA ayant préféré opérer un revirement de sa jurisprudence annoncée six mois plus tôt.

 

 

B-     Le cautionnement hypothécaire est désormais un cautionnement 

L’approche personnaliste du cautionnement hypothécaire consiste à voir dans cette sûreté une pure sûreté personnelle, un cautionnement pour ainsi dire.

C’est ce que décide la CCJA en l’espèce en retenant, par adoption des motifs de la Cour d’appel, que « La société TORICAF S.A. n’est intervenue dans la conclusion des conventions de financement dont l’exécution est poursuivie qu’en qualité de caution, en cantonnant sa garantie à l’affectation en hypothèque de premier rang de son immeuble ». Ainsi, ajoute t-elle, « la Cour d’appel qui, faisant application de l’article 12 de l’Acte uniforme, a qualifié lesdits actes de cautionnement », n’a en rien violé la loi.

Ainsi, selon la CCJA, la nature des engagements en cause semble t-elle être déterminée par la qualité prise dans les contrats par la société TORICAF, en l’occurrence celle de « caution ». Le fait d’avoir cantonné la garantie à l’affectation en hypothèque d’un immeuble ne semble pas déterminant[23].

La CCJA fonde cette décision sur l’article 12 alinéa 1 de l’AUS de 1997 aux termes duquel «  la caution peut garantir son engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens ».

Aussi, la motivation de la haute juridiction se cristallise t-elle dans l’idée de la possibilité, reconnue par le législateur pour une caution, de combiner son engagement personnel avec une sûreté réelle.

L’une des combinaisons possibles de ces deux techniques de sûreté consiste pour la caution, à contre-garantir son propre engagement de caution, par une sureté réelle. C’est ce qu’un auteur a appelé la superposition des deux garanties.[24] Le tiers s’engage d’abord à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. En cela, il y a cautionnement expressément stipulé. Ensuite, pour garantir l’exécution de cet engagement personnel, il donne un ou plusieurs de ses biens. La sûreté réelle ici n’est que l’accessoire du cautionnement, lui-même accessoire de la dette du débiteur principal. C’est cette hypothèse que vise l’article 12 précité.[25] Le législateur ne dit pas clairement si, dans ce cas, on est en présence d’un cautionnement ou d’une sûreté hybride.

Deux arguments militent, toutefois, en faveur de la thèse du cautionnement. D’abord, la position de l’article 12 dans l’AUS de 1997. Il est placé au sein du Titre I consacré aux sûretés personnelles, dans le chapitre I qui concerne le cautionnement et dans une  section intitulée « Modalités du cautionnement ». Il fait suite, en sus, au cautionnement solidaire et au certificateur de caution. Si le législateur de l’OHADA n’entendait pas classer cette figure de sûreté parmi les sûretés personnelles, il ne lui aurait pas accordé une place dans ce titre, encore moins dans ce chapitre qui traite du cautionnement.[26]

Ensuite, l’exclusion apparente de la sûreté réelle pour autrui qui ressort de l’article 47 alinéa 2 de l’AUS de 1997[27]. Aux termes de ce texte, « Le constituant du gage peut être le débiteur ou un tiers. Dans ce dernier cas, le tiers est tenu comme une caution réelle ».

Or, comme cela résulte de l’article 2077 ancien du code civil applicable dans nombre de pays de l’espace OHADA, le gage peut être donné par un tiers pour le débiteur[28]. Le tiers constituant n’entend engager qu’un bien spécifique et non l’ensemble de son patrimoine. En édictant que ce tiers est tenu « comme une caution…. » fût-elle réelle, le législateur a, semble t-il, entendu assimiler la sûreté réelle pour autrui à un cautionnement[29]. La figure de la sureté réelle pour autrui, en tant que sûreté réelle, contrairement au droit français, ne semblait donc pas avoir été prévue par le législateur de l’OHADA[30]. Dans les seuls articles où il a évoqué la possibilité de combinaison des deux suretés, le législateur a mis en bonne place le cautionnement. Et pourtant, dans la pratique, il est bien possible que le tiers constituant affecte son bien en garantie de la dette du débiteur sans aucun engagement personnel.[31]

Mais alors, le contrat litigieux en l’espèce rentre t-il dans l’hypothèse de garantie du cautionnement par une sûreté réelle ? Pour la Cour d’appel d’Abidjan suivie par la CCJA, la réponse affirmative ne fait aucun doute, puisque la TORICAF qui a affecté son immeuble en hypothèque de la dette de PRONIBEX-CI « n’a agi qu’en qualité de caution. »

La « qualité de caution » dont il est question ici peut résulter  soit, d’une intention clairement exprimée des parties, soit de l’appellation de « cautionnement hypothécaire » ou de « caution hypothécaire » retenue par les rédacteurs du contrat.

 Le caractère laconique des faits relatés ne permet pas d’examiner de près le contenu de l’engagement réel de la société TORICAF. La question à laquelle devait répondre la Cour d’appel, en tant que Juge du fond, était, à notre point de vue, celle de savoir quelle était la volonté réelle des parties. La société TORICAF a-t-elle voulu contracter un engagement personnel ?

On peut légitimement croire que cette recherche n’a pas été faite et que les juges se sont contentés de « la qualité de caution » prise par la société TORICAF dans le contrat. C’est en cela qu’on peut  parler de revirement d’autant plus que dans l’espèce ayant abouti à l’arrêt du 27 octobre 2016, le tiers engagé avait pareillement pris la qualité de caution, et ceci n’avait pas empêché les juges de la CCJA d’y voir une sûreté réelle. Les faits disaient en effet que « par acte notarié en date du 10 novembre 2005, la BCS et la SOMAPRE, représentées par leurs représentants légaux, signaient une convention de compte courant à la garantie de l’exécution de laquelle monsieur Abdoulaye Halidou CISSE se constituait caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble sis à Banankoro, objet du titre foncier n°912 de KATI ». Qu’est-ce qui justifie que cette « affectation en hypothèque » de son immeuble par la caution hypothécaire soit qualifiée ici de sûreté réelle et là de cautionnement ?

Pour notre part, seule une manifestation claire et non-équivoque de la volonté des parties devait permettre de retenir la qualification de cautionnement[32]. Cette recherche n’ayant pas été faite en l’espèce, il est raisonnable de penser que la CCJA a voulu amorcer un revirement de sa jurisprudence d’octobre 2016.

On peut, en outre, se demander si le fondement retenu par la CCJA, à savoir l’alinéa 1 de l’article 12 est le plus approprié. L’alinéa 2 du même texte dispose que la caution « peut également limiter son engagement à la valeur de réalisation du ou des biens sur lesquels elle a consenti une telle sûreté ». Les faits de l’espèce révèlent qu’il y a eu cantonnement de l’engagement de la société TORICAF S.A. à l’affectation en hypothèque de l’immeuble. On peut lire dans cette formulation l’idée visée plutôt à l’alinéa 2 de l’article 12, c’est-à-dire la limitation de l’engagement de la caution à la valeur de réalisation du bien grevé. On peut même y voir l’idée d’exclusion de tout engagement personnel. Le constituant, en l’occurrence la société TORICAF SA n’entendait pas visiblement s’engager au-delà de l’immeuble affecté en hypothèque, puisqu’elle a bien cantonné sa garantie à l’affectation en hypothèque de son immeuble. Comment charger un tel contractant d’un engagement de payer la dette d’autrui, si du moins, la définition du cautionnement reste la même, à savoir le contrat par lequel la caution s’engage à payer la dette d’autrui si celui-ci n’y satisfait pas lui-même ?

Cette interrogation incline à penser que l’approche personnaliste du cautionnement hypothécaire retenue par la CCJA en l’espèce parait, sinon divinatoire,  pour emprunter le mot du Professeur SIMLER[33], au moins hâtive. Le droit des sûretés étant une matière qui admet pour une large part, la liberté contractuelle[34], l’analyse devrait tourner autour du contenu réel du contrat et de la recherche de l’intention des parties, au lieu de se cristalliser sur l’usage du terme « caution »[35].

Somme toute, les garanties souscrites au profit de la BOA-CI étant qualifiées de cautionnement, leur validité reste soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration.

 

II-                L’exigence de l’autorisation préalable du conseil d’administration

Un faux débat a été forcé dans la présente espèce par la BOA-CI qui soutenait que l’autorisation préalable du conseil d’administration prévue à l’article 449 de l’AUSCGIE n’avait pas à être invoquée pour la validité des engagements de la société TORICAF-S.A, motif pris de ce que lesdits engagements sont des sûretés réelles. Aussi bien la Cour d’appel d’Abidjan que la CCJA sont rentrées dans ce débat, puisqu’elles ont répondu qu’il s’agissait plutôt de cautionnement, avant d’en tirer comme conséquence l’application de l’article 449. Le défaut de cette autorisation préalable impliquait donc la nullité des engagements (A). Pourtant, ce cheminement dans lequel la BOA-CI et ses conseils ont entrainé les juges n’était pas si nécessaire. Bien plus, en rentrant dans cette logique, la CCJA semble admettre  implicitement que ce texte ne s’appliquerait effectivement pas aux sûretés réelles. Ce qui constituerait une dangereuse réduction de sa portée (B).

 

A-     La nullité des actes de cautionnement consécutive au défaut d’autorisation préalable

Le dirigeant social d’une société anonyme avec conseil d’administration, investi de tous pouvoirs pour engager la société à l’égard des tiers[36] fait face à des contre-pouvoirs indispensables au maintien de l’équilibre de la société et parfois à sa survie. Le conseil d’administration fait office d’un de ces contre-pouvoirs[37]. C’est dans cette optique que certains contrats sont soumis à son autorisation avant leur conclusion.

Aux termes de l’article 449 alinéa 1 de l’AUSCGIE du 17 avril 1997 en effet, « Les cautions, avals, garanties et garanties à première demande souscrits par la société pour des engagements pris par des tiers font l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration ». L’article 506 du même Acte uniforme pose la même règle pour les sociétés anonymes avec administrateur général.

Il est admis, même si cela ne ressort pas expressément du texte, que la sanction du défaut de cette autorisation préalable du conseil d’administration est la nullité du contrat[38]. Il est, certes, permis de se demander si telle était réellement l’intention du législateur. En effet, dans les articles 444 et 450 du même Acte uniforme portant respectivement sur les conventions réglementées et les conventions interdites, la sanction de la nullité a été expressément prévue[39]. Le silence du législateur dans l’article 449 n’est-il pas un appel au juge d’avoir à apprécier l’opportunité de la sanction de la nullité et opter, le cas échéant, pour l’inopposabilité, comme c’est le cas en Jurisprudence française[40] ?

Cette dernière sanction aura le mérite de permettre au créancier, dans le cas du cautionnement, d’avoir la possibilité de faire exécuter la garantie contre la personne du dirigeant social. Ce qui lui offre comme assiette de recouvrement de sa créance deux patrimoines au lieu d’un. Ce que ne fait pas la nullité qui anéantit rétroactivement la sûreté. Une politique de protection des créanciers peut ainsi rendre préférable l’inopposabilité à la nullité[41].

En toute hypothèse, la Cour d’appel d’Abidjan a déclaré, en l’espèce, nuls les actes de cautionnements souscrits par la société TORICAF S.A. sans l’autorisation du conseil d’administration.

La société TORICAF S.A. obtient donc l’annulation des actes de cautionnement dits hypothécaires. C’est ce que redoutait la BOA qui s’est efforcée  de soustraire ces contrats à l’application de l’article 449. Sa démarche est compréhensible ou du moins, légitime. Voici un gérant d’une société qui sollicite un prêt de plus de 4 milliards au nom de sa société. Pour garantir ledit crédit, il fait intervenir une seconde société dont il est également le dirigeant. On pourrait dire que, sciemment ou non, il fait économie de l’autorisation du conseil d’administration de la seconde société qu’il utilise comme caution hypothécaire. Quelques années après, la société débitrice tombe en déconfiture et est admise en liquidation. La banque met en œuvre la garantie et il lui est opposé ce défaut d’autorisation du conseil d’administration. Les faits ne précisent pas si c’est toujours le même dirigeant social qui était resté aux affaires au moment de l’action de la société TORICAF S.A. Quoiqu’il en soit, on comprend l’attitude de la BOA-CI qui a cherché tous les artifices possibles pour faire échec à l’application de l’article 449 et éviter la nullité de sa garantie. La mauvaise foi est perceptible en effet. On peut même songer à la fraude. Cette fraude serait démontrée, par exemple, s’il était établi que le dirigeant en cause savait que la société PRONIBEX-CI Sarl en faveur de laquelle il a obtenu le prêt avait une situation difficilement redressable et qu’en outre, la garantie offerte avait été volontairement soustraite à l’autorisation du conseil d’administration pour l’exposer à la nullité. Cette hypothèse est possible en raison du fait que c’est la même personne qui agit aux noms des deux sociétés dans la conclusion des contrats.

C’est d’ailleurs une technique à laquelle le dirigeant peut faire recours pour camoufler des malversations et dépouiller une société au profit d’une autre surtout s’il cumule les fonctions de Directeur Général et de Président du Conseil d’administration[42].

Il y a, hélas, une sorte de prime à la mauvaise foi dans le fait de donner raison à la société TORICAF S.A.

Seulement, l’argumentation de la BOA-CI qui consiste à soutenir que seules les sûretés réelles étaient soumises à l’exigence de l’autorisation préalable du conseil d’administration était peu convaincante. L’argument de la fraude aurait peut-être eu plus de chances de prospérer, encore que des éléments de fait établis aient milité en sa faveur.

Au demeurant, la BOA-CI, n’a pas pu être logée à la même enseigne que la BTCI-Togo qui, dans une espèce similaire ayant abouti à un arrêt de la même CCJA du 09 juin 2016, a vu cette juridiction soustraire à l’autorisation du conseil d’administration, un acte intitulé par les parties « délégation de loyers » qui avait pourtant vocation à fonctionner comme une garantie[43].

Il ne pouvait en être autrement, d’autant plus que même si la sûreté en cause était considérée comme une sûreté réelle, nous estimons pour notre part que l’article 449 devait recevoir application.

 

 

B         - La dangereuse réduction de la portée de l’article 449 de l’AUSCGIE

 Passer par la détermination de la nature des engagements en cause pour aboutir à l’exigence de l’autorisation préalable, c’est dire implicitement que si on était en présence d’une sûreté réelle comme le soutenait la BOA-CI, cette autorisation ne serait pas requise.

Pour la BOA-CI en effet, l’affectation hypothécaire n’est nullement visée par l’article 449 de l’AUSCGIE. Pour décider que ce texte est applicable, les juges ont dû retenir d’abord que les sûretés consenties sont des cautionnements. Pourquoi les hauts magistrats se sont-ils sentis obligés de passer par ce raisonnement, alors qu’il est constant que nous sommes en présence de sûretés, quelles qu’elles soient ?

La Cour partagerait-elle donc cette affirmation de la BOA-CI selon laquelle les sûretés réelles en général et l’hypothèque en particulier ne seraient pas visées par l’article 449 ?

Si pour la CCJA, ce texte devait recevoir application quelle que soit la nature, réelle ou personnelle, des sûretés en cause, la branche du moyen du pourvoi relative à la violation des articles 2 à 38 et 117 à 131 de l’AUS consistant à soutenir que la Cour d’appel a fait une confusion entre sûretés réelles et sûretés personnelles devait être déclarée sans intérêt ou inopérante.

Si, en revanche, au lieu de cela, la Cour s’est évertuée, comme il a été le cas, à répondre à ce moyen, avant de retenir, en guise de conséquence, l’application de l’article 449, cela va sans dire qu’elle admet que ce texte ne s’appliquerait effectivement qu’aux sûretés personnelles. Ce qui constituerait, à notre avis, une réduction tant du sens que de la portée du texte.

Dans sa rédaction applicable aux faits de la cause, le texte dispose : « Les cautions, avals, garanties et garanties à première demande souscrits par la société pour des engagements pris par des tiers font l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration ».

Cette disposition soumet à l’autorisation préalable du conseil d’administration les cautions, avals, garanties et garanties à première demande. S’il est évident que les cautions, avals et garanties à première demande sont des sûretés personnelles, le mot « garanties » contenu dans le texte, outre garanties à première demande, cautions et avals, doit nécessairement correspondre à une réalité différente. Laquelle alors ?

Terme générique, le mot « garantie » n’a pas été défini par le législateur. Mais les quelques définitions empruntées à la doctrine nous renseignent que « Les garanties sont des institutions qui ont pour objet de protéger les créanciers contre les risques du crédit, principalement celui de l’insolvabilité de leurs débiteurs. Les principales garanties sont les sûretés, mais d’autres procédés tendent aux mêmes fins et peuvent donc aussi être utilisés par les créanciers »[44]. Selon le vocabulaire juridique de l’association Henry CAPITANT, il recouvre « tout mécanisme qui prémunit une personne contre une perte pécuniaire »[45].

 

Si l’on retient qu’il s’agit de tout mécanisme ayant pour objet ou finalité de protéger le créancier contre les risques du crédit, il va de soi que le mot recouvre l’ensemble des sûretés et va au-delà, les sûretés étant une espèce particulière du genre.

En soumettant à l’autorisation préalable du conseil d’administration les « garanties » souscrites par la société pour des engagements pris par des tiers, le législateur a forcément visé les sûretés réelles[46]. On comprend alors difficilement ce raisonnement selon lequel les sûretés réelles ne seraient pas visées par ce texte.

Cette réduction, non seulement de la portée du texte mais encore de son sens même, est d’ailleurs d’une particulière dangerosité.

La finalité du législateur était en effet d’éviter que le dirigeant social, pour des intérêts étrangers à ceux de la société, engage le patrimoine de celle-ci, à l’insu des organes de contrôle, en particulier le conseil d’administration. C’est une mesure de précaution, destinée à préserver la santé de la société[47]. L’exigence de l’autorisation préalable du conseil d’administration permet ainsi de vérifier non seulement la conformité de l’opération à l’intérêt social, mais aussi  sa pertinence et son opportunité[48], surtout qu’il s’agit de garantir les engagements pris par un tiers et non pas par la société elle-même. Dans l’espèce ayant abouti à l’arrêt commenté, le dirigeant de la TORICAF S.A. avait un intérêt personnel à la PRONIBEX-CI Sarl[49], tiers cautionné. Il n’est pas sûr que l’intérêt de TORICAF S.A. ait été pris en compte dans cet engagement. La fonction de ce texte est précisément de faire obstacle à ce type de comportement.

La question qui se pose est alors celle-ci : cet objectif serait-il atteint si le texte n’avait vocation à s’appliquer qu’aux sûretés personnelles à l’exclusion aussi bien des sûretés réelles que de toutes les autres formes de garantie ? La réponse négative semble s’imposer. Si le dirigeant peut seul, sans autorisation du conseil d’administration, affecter, en garantie de la dette d’un tiers, tout l’actif de la société, l’article 449 se viderait de son sens. Il aurait suffit pour ce dirigeant indélicat d’affecter en hypothèque le parc immobilier de la société sans l’engager personnellement par un cautionnement, ou mettre en nantissement le stock de marchandises pour la ruiner entièrement au profit de ses propres intérêts. Même si une action en responsabilité pour faute personnelle ou pour abus de biens sociaux pourra être engagée contre lui[50], il n’est pas évident que ces actions, somme toute, curatives pourront jouer le même rôle et être aussi efficaces que la mesure préventive de  l’exigence de l’autorisation préalable.

Il est donc, à notre avis, crucial, pour l’efficacité du contrôle de la gestion de la société, de comprendre l’article 449 dans sa rédaction de 1997 comme incluant, pas seulement les sûretés dans leur ensemble, mais aussi les autres formes de garantie.

Dans l’arrêt de la CCJA du 09 juin 2016, l’engagement souscrit sans autorisation du conseil d’administration était matérialisé par deux clauses, l’une intitulée « délégation de loyers »  et l’autre « clause de garantie ». La première était stipulée en ces termes : « afin de garantir le financement dudit matériel, le loueur a accepté de déléguer, à due concurrence de l’échéance mensuelle de remboursement du prêt à la banque comprenant principal, frais et accessoires, les loyers à lui revenir de son contrat de location ». La seconde dénommée « clause de garantie » était ainsi rédigée : « En cas de défaillance du loueur, et à la première défaillance entrainant un non-paiement d’une seule échéance à son terme, quelle qu’en soit la cause y compris la force majeure, ou en cas de non litige compromettant la bonne exécution du plan de remboursement du prêt par le loueur, le locataire s’engage par la présente à se substituer au loueur au profit du banquier et à assurer la charge du remboursement au profit du banquier aux lieu et place du loueur, aux mêmes charges et conditions que le loueur, ce à première demande du banquier »[51].

Malgré la clarté de ces clauses qui révélaient l’intention des parties d’utiliser le mécanisme de délégation de loyers comme une garantie du remboursement du prêt, la CCJA a pu soustraire ces clauses du champ d’application de l’article 449 au motif que la délégation de loyers est un moyen de paiement et d’extinction de la dette et non une garantie, annonçant déjà sa propension à interpréter ce texte de façon restrictive.

Et pourtant, le législateur voyant probablement venir le danger, avait déjà réagi par la réforme de 2014. Par cette réforme, le législateur a clarifié son intention de couvrir par ce texte, toutes les formes de garantie[52].

Avec la nouvelle rédaction et l’introduction du groupe de mots « et autres garanties », il serait extrêmement malaisé, dorénavant, de limiter le champ d’application de ce texte à une forme particulière de sûreté, ou même de garantie.

En conclusion, le cautionnement dit hypothécaire consenti par une société anonyme pour garantir la dette d’autrui, doit nécessairement, en raison de sa nature de garantie, être soumis à l’autorisation préalable du conseil d’administration. Qu’il soit soumis au régime du cautionnement pur et simple, d’une sûreté réelle, ou des deux, cette exigence  ne devrait pas en souffrir. Il revient donc aux établissements de crédit, bénéficiaires de ces garanties, de prendre soin d’exiger, avant l’octroi du crédit, la communication de la décision du conseil d’administration autorisant l’opération. Le recouvrement de leurs créances en dépendra. Quant à la nature et au régime juridique du cautionnement hypothécaire, le chantier reste ouvert[53]. En attendant, les rédacteurs d’actes ont tout intérêt à prendre toutes les précautions nécessaires[54], afin d’éviter toute imprécision susceptible de faire voler en éclats les chances de recouvrement de créances de montants parfois astronomiques. /

 

 



[1]Akoélé et Akoko sont des prénoms donnés aux jumelles nées un mercredi dans certaines cultures du Sud-Togo.

[2] L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.

 

[3]Acte uniforme du 17 avril 1997 applicable aux faits de l’espèce.

 

[4]Notre analyse démontrera plus loin qu’en réalité, les termes de l’article 449 de l’AUSCGIE, en notre sens, ne rendent pas nécessaire ce débat et que ce texte a vocation à s’appliquer à toutes les garanties.

[5] Bréhima Kaména, maître de conférences agrégé à l'université des sciences juridiques et politiques de Bamako, in L’Essentiel du Droit africain des Affaires, n°9, Octobre 2017, p. 2.

 

[6] Ce débat a eu lieu en Droit Français pendant des décennies et a fait couler beaucoup d’encres. Pour un échantillon de ces débats, F. Grua, Le cautionnement réel, JCP 1984. éd.GI.3167.

 

[7] Arrêt n° 156/2016 du 27 octobre 2016, consulté le 19 novembre 2018 sur le site http://legiafrica.com. ;

 

[8] En France également, on a assisté, pendant des années, dans la jurisprudence,  à un mouvement  d’oscillation  et à une divergence de vue entre la chambre commerciale et la première chambre civile. Voir à ce propos, F. Grua, op cit. note n°6 ; M. Cabrillac et Ch. Mouly, Droit des sûretés, Litec, 4e éd. 1997, n° 342.

 

[9] Note sous Cass. Civile 1ère, 4 mai 1999, D. 2000, page 302.

 

[10] L. Aynes, Sûretés, publicité foncière, Cujas, 2000-2001, n°150 ; S. Piedelièvre, « le cautionnement réel n’est pas une sûreté personnelle », D. 2000, sommaire p. 394 ; Marty et Raynaud par Jestaz, Les sûretés, la publicité foncière, Sirey 1987, n°626 ; Mestre, Putman et Billiau, Traité de droit civil spécial des sûretés réelles, ss. Dir. J. Ghestin, LGDJ 1996, p.8 ;

 

[11] Article 2334 Code civil français : «  Le gage peut être consenti par le débiteur ou par un tiers ; dans ce dernier cas, le créancier n’a d’action que sur le bien affecté en garantie ».

 

[12] Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11ème éd., p. 156.

 

[13] Cette définition, par rapport à celle retenue dans l’Acte uniforme du 17 avril 1997 n’a introduit que la précision sur le caractère présent ou futur de l’obligation.

 

[14] Article 190 de l’AUS du 15 décembre 2010.

 

[15] Voir les articles 146 de l’AUS de 1997, 223 et 225 de l’AUS du 15 décembre 2010.

 

[16]Marie-Thérèse ATANGANA-MALONGUE, Le cautionnement réel dans l’Acte uniforme OHADA,  Penant 872, p. 279.

 

[17] « Le cautionnement ne se présume pas, quelle que soit la nature de l’obligation garantie. A peine de nullité, il doit être convenu de façon expresse entre la caution et le créancier » (Article 4 alinéa 1 de l’Acte uniforme de 1997).

 

[18] Aux termes de ce texte : « La caution qui ne sait ou ne peut écrire doit se faire assister de deux témoins qui certifient, dans l’acte de cautionnement, son identité et sa présence et attestent en outre que la nature et les effets de l’acte lui ont été précisés ».

 

[19] Voir note n°7.

 

[20] Civ. 1ère, 29 février 2000, Bull. Civ I, n°69 ; Dalloz 2000, 829, note Bonnet. D. 2000, AJ p. 164, obs. J. Faddoul ; Cass. Civ. 1ère, 4 mai 1999, Bull. civ. I, n° 144 ; Dalloz Affaires 1999, p. 899, obs. A. L. ; JCP 1999, I, n° 156, obs. Simler ; Banque et droit, juill.-août 1999, p. 37, obs. Jacob ; RTD civ. 1999, p. 880, obs. Crocq ; D. 2000, Jur. p. 302, note V. Bonnet. Dans le même sens, Civ.1ère, 1er février 2000 Bull. Civ I, n°33 ; RTDCiv 2000, 366, obs Crocq : « le cautionnement réel, fourni par celui qui consent la constitution d’une hypothèque pour garantir le remboursement de la dette d’un tiers est une sureté réelle et non pas un cautionnement personnel ». En sens inverse, Civ. 1ère, 15 mai 2002, Bull. Civ. I, n°127 ; D. 2002. 1780 ; JCP. 2002.I. 162, n°3, Obs. Simler. « Le cautionnement hypothécaire est un engagement qui comprend une véritable obligation personnelle de garantir, dans la limite de la valeur, appréciée au jour de la demande d’exécution, du ou des biens engagés ».

 

[21] Cass. Ch mixte, 2 décembre 2005 Bull. Civ. N°7 ; JCP 2005 II. 10183 note Ph. Simler ; D. 2006, 729, concl. J. Sainte-Rose et note L. Aynès ; RTD civ. 2006, p.357, obs. B. Vareille, et 594, obs. P. Crocq.

 

[22] La solution a été réaffirmée à plusieurs reprises. Pour une application récente, Cass. Civ. 3ème, 12 avril 2018, no 17-17542, PB, Obs. Dimitri Houtcieff, RDC 2018 n° 115n1, p.371 ; Cass. civ. 3ème, 23 mars 2017, no 16-10766, Note Marc Mignot, L’Essentiel du Droit bancaire, n°5, p. 7 ; Cass. Civ 1ère,  25 nov. 2015, n° 14-21332 : Bull. civ. I, n° 290 ; JCP G 2016, p. 218, note Pellier J.-D. ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 20, obs. Legeais D. : « La sûreté réelle consentie pour garantir la dette d’un tiers, n’impliquant aucun engagement personnel à satisfaire à l’obligation d’autrui, n’est pas un cautionnement. Limitée au bien affecté en garantie, elle n’ouvre, à celui qui la constitue, ni le bénéfice de discussion ni le bénéfice de division. » ; Cass. com., 13 janv. 2015, n° 13-16727 : RD bancaire et fin. 2015, comm. 44, obs. Legeais D. : selon cette décision, le tiers garant ne bénéficie pas du devoir de mise en garde pesant sur le créancier dont profite la caution.

[23] Cette position rejoint celle autrefois adoptée en Droit français. Civile 1ère, 15 mai 2002, préc.

 

[24]  BROU KOUAKOU Mathurin, Le Droit OHADA et le cautionnement hypothécaire, Penant n°856, p. 273

 

[25] Le contenu de cet article est repris sans modification à l’article 22 de l’AUS du 15 décembre 2010.

 

[26] Dans le même sens, Marie-Thérèse ATANGANA-MALONGUE, Op. cit. P. 284.

 

[27] Cet article disparait de l’Acte uniforme du 15 décembre 2010. Ce qui traduit une évolution vers l’admission de la sûreté réelle pour autrui sans aucun engagement personnel.

 

[28] Voir l’ancien article 1020 pour l’hypothèque.

 

[29]  Cette analyse a semblé être abandonnée par la CCJA par l’arrêt du 27 octobre 2016 qui consacrait clairement la sûreté réelle pour autrui. Voir commentaires de W. Dominique Kabré, agrégé des facultés, maître de conférences à l'université Ouaga II (Burkina Faso) dans L’Essentiel du droit africain des affaires, Fév. 2017, n°110d1, p. 3.

 

[30] Dans ce sens, Marie-Thérèse ATANGAN-MALONGUE, op.cit., pages 291-292.

 

[31] En fait, quatre différentes combinaisons des deux sûretés sont possibles. Primo, le tiers s’engage comme caution et donne en plus un bien meuble ou immeuble en garantie de la dette du débiteur. C’est l’hypothèse de la juxtaposition des deux sûretés qui demeurent autonomes. Secundo, le tiers en s’engageant comme caution contre-garantit son propre engagement personnel par une sûreté réelle. C’est l’hypothèse de la superposition. Ici la sûreté réelle est l’accessoire du cautionnement. Tertio, une variante de cette superposition consiste pour la caution à limiter son engagement à la valeur du bien donné en garantie. Enfin, le tiers affecte uniquement son bien en garantie de la dette du débiteur sans aucun engagement  personnel. C’est l’hybridation  que la pratique a appelé abusivement « cautionnement  purement hypothécaire ». Voir pour une synthèse de ces combinaisons, Avis de l’Avocat général M. Sainte Rose, Bulletin d’information de la Cour de Cassation, Dossier Caution réel, www.courdecassation.fr, consulté le 09/11/2019 ; Michel GRIMALDI, La nature juridique du cautionnement réel, de la mixité en Droit des Sûretés, Revue des Contrats 2003, n°1, p . 170.

 

[32] G. Champenois, Defrénois 2000. P.1323. Selon cet auteur, il est peu probable que dans le silence du contrat, la volonté des parties soit d’adopter le système relativement complexe du cautionnement mixte dont les modalités d’application demeurent incertaines. En revanche, quand le contrat révèle clairement l’intention des parties de recourir aux deux types de sûretés, rien n’empêche de retenir un « vrai » cautionnement hypothécaire valant cautionnement et hypothèque. Voir pour une application récente, Civ. 1ère, 9 janv. 2019, n°17-19570, Gaz. Pal. 19 févr. 2019, n° 342a4, p. 27, note Albiges C. Commentaire de Charles Gijsbers, professeur à l'université de Rouen Normandie, Defrenois, 14 mars 2019, n°146u2, p.26.

 

[33] Ph. Simler et Ph. Delebecque, JCP G, 2002, I, 162.

 

[34] Voir sur la question, Joseph Issa-Sayegh, in « La liberté contractuelle dans le droit des suretés OHADA », Revue Penant 2005, n°851, pp. 150-173.

 

[35] M. Sainte-Rose, L’emploi du terme « cautionnement » dans une sûreté réelle pour autrui n’y change rien. « Déduire de la constitution d’une sûreté réelle un engagement personnel à concurrence de la valeur du bien, c’est très exactement déduire d’un fait connu-la sûreté réelle-un fait inconnu et supposé- l’engagement personnel ». Op.cit. Note 31.

 

[36] Article 465 alinéa 3 AUSCGIE.

 

[37] Voir article 435 AUSCGIE.  Cette conception du conseil d’administration a été véritablement consacrée en Droit français par la loi relative aux nouvelles régulations économiques  n° 2001-420 du 15 mai 2001 dont le titre 1er  est relatif aux sociétés commerciales, le chapitre 1er s'intitulant « équilibre des pouvoirs et fonctionnement des organes dirigeants ». Voir en ce sens déjà, avant l’adoption de cette loi, P. LE CANNU, Légitimité du pouvoir et efficacité du contrôle dans les sociétés par actions, Bull. Joly 1995. 637.

 

[38]Paul-Gérard POUGOUE, Commentaires sous l’article 449 de l’AUSCGIE, OHADA, Traité et Actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2014, page 530.

 

[39]Pour les conventions réglementées, l’article 444, tout en prévoyant la nullité, la soumet à la preuve d’un dommage causé à la société par la convention incriminée. On retrouve en filigrane l’intention du législateur de sauver les conventions qui profitent à la société malgré l’irrégularité dans leur conclusion. Ce qui n’est pas le cas des conventions interdites dont la nullité doit être prononcée, aux termes de l’article 450, sans qu’il soit nécessaire de rapporter la preuve d’un grief causé à la société.

 

[40]Voir par exemple Com., 8 décembre 1998, Bull. Joly 1999, p. 535, Obs. Paul LE CANNU, ou plus récemment, Com., 15 janvier 2013, pourvoi n°11-27648 : En application de l’article L.225-35 al 4 du code de commerce, la Cour de cassation déclare inopposable à une société anonyme, cessionnaire de titres sociaux, pour défaut d’autorisation préalable du Conseil d’administration, l’engagement de se substituer au cédant, en tant que caution dans les rapports avec un tiers créancier.

 

[41] D’autres auteurs aussi plaident pour l’inopposabilité. Voir Denis POHE TOKPA,  Encyclopédie du Droit OHADA, page 1865, n°68.

 

[42] Il a été à juste titre fait observer que « ce cumul de fonction fait de lui le président d’un organe qui est chargé de le contrôler. Si cette situation est mal gérée, elle peut s’avérer désastreuse pour l’entreprise, car il est difficile d’être à la fois juge et partie. Voir Angéline F. NGOMO, Pour une redéfinition des pouvoirs des organes intervenant dans la gestion des S.A., Juridis info, n°16, 1993, citée dans les Commentaires sous l’article 465 AUSCGIE, Code OHADA, Juriscope 2018, p. 551.

 

[43] Arrêt n° 107/2016 du 09 juin 2016, affaire Banque Togolaise pour le Commerce et l’Industrie (BTCI S.A.) C/ TOGO TERMINAL S.A. Site www.ohada.org consulté le 15/11/2018.

 

[44]  Dominique LEGEAIS, Sûretés et garanties du crédit, LGDJ, 12è éd., p. 11.

 

[45] Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11ème éd., p. 486.

 

[46] En droit français, la Jurisprudence nous renseigne que les textes des articles L. 225-35, al. 4, et L. 225-68, al. 2 du code de commerce (équivalent de l’article 449 AUSCGIE) qui parlent également de « garanties » couvrent un champ d’application qui va au-delà des sûretés. En ce sens, Com. 4 mai 1999, non publié au Bulletin, RJDA 7/99, n° 794 ; Bull. Joly 1999, p. 975, note D. Legeais ; JCP éd. E 2000, p. 31, n° 6, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain ; V. également Rép. min., JOAN, 3 déc. 1970, p. 6095 ; Rev. sociétés 1971, p. 109.

 

[47] Voir ainsi CA Paris 13 janv. 1989, D. 1989, Somm. p. 294, obs. L. Aynès ; Bull. Joly 1989, p. 259, note M. Jeantin : « l'objet de l'article 98 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, modifiée, est de protéger la société contre les dangers que peuvent représenter les engagements garantissant les dettes d'un tiers, du moins lorsqu'un tel acte ne relève pas, par nature, de l'objet social ».  

 

[48] J. Honorat, Sociétés et cautionnement, Defrénois 1982, p. 1569, n° 25 : « par leur finalité respective, le cautionnement et la société sont des actes antinomiques » ; P. Théry, Sûretés et publicité foncière, 2e éd., PUF, 1998, n° 22, qui relève que l'esprit lucratif qui anime les sociétés s'accommode mal de la gratuité de principe du cautionnement. Cités par Bruno DONDERO, Réflexions sur les mécanismes d'autorisation des sûretés et garanties consenties par les sociétés anonymes, Recueil Dalloz 2004, p.405.

 

[49]Puisqu’il en était également le Gérant.

 

[50] Voir les articles 161 à 163 de l’AUSCGIE pour l’action individuelle, 165 à 171 pour l’action sociale, 891 pour l’abus de biens sociaux.

 

[51] Voir note 43.

 

[52] Article 449 de l’Acte uniforme du 30 janvier 2014 : « Les cautionnements, avals, garanties autonomes, contre-garanties autonomes et autres garanties souscrites par les sociétés autres que celles exploitant des établissements de crédits, de microfinance ou d’assurance-caution dûment agréées et pour des engagements pris par des tiers font l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration. »

 

[53] Il n’est pas sûr que la jurisprudence de la CCJA soit déjà fixée. Au regard des critiques qu’on peut formuler contre l’inflexion de sa position dans cet arrêt dont les motivations apparaissent très difficilement, il n’est pas exclu que la Cour fasse évoluer sa jurisprudence vers la solution de l’application ponctuelle des règles du cautionnement à une sûreté réelle souscrite pour garantir la dette d’autrui, sans la qualifier de cautionnement. Voir dans ce sens Cass. com., 12 juill. 2011, n° 09-71113 : Bull. civ. I, n° 118 ; Cass. com., 19 févr. 2013, n° 11-28423 : Bull. civ. IV, n° 26 – Cass. 1re civ., 3 juill. 2013, n° 12-21126 : Bull. civ. I, n° 144 ; Cour d'appel Pau, 7 avril 2011, no 10/00430, Caisse de Crédit mutuel Antibes étoile c/ Mme B. Obs. Christophe Albiges, Professeur à l'université Montpellier, Gaz. Pal. 16 juin 2011, n°GP20110616006. P.9. Sens inverse, Civile 3ème, 12 avril 2018, dans un arrêt très critiqué par la Doctrine. Op Cit. note 22.

 

[54] Lors du 82e congrès des notaires en France consacré en 1982 aux garanties du financement, il a été émis le vœu que pour lever toute ambiguïté, les termes « cautionnement personnel et hypothécaire » soient utilisés pour désigner l'engagement personnel assorti d'une garantie hypothécaire et que les termes « caution strictement hypothécaire » soient réservés pour désigner la caution réelle hypothécaire, c'est-à-dire la personne dont l'engagement est limité à la valeur de l'immeuble sur lequel elle a conféré un droit réel au créancier. (Defrénois, 1988, Act. not. p. 109), cité par Pierre CROCQ, Le cautionnement réel ou les affres de la polysémie, RDT Civ., 1999, p.152.

., 1999, p.152.

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