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L’évolution de l’ordre public international en droit de l’arbitrage OHADA, ombres et lumières

L’évolution de l’ordre public international en droit de l’arbitrage OHADA, ombres et lumières

Par Me Kossi Assiom BOKODJIN[1]

Avocat au Barreau du Togo

 

Résumé

Le rayonnement de la notion d’ordre public international s’est accru avec la réforme du 23 novembre 2017 du droit de l’arbitrage OHADA. Elle joue un rôle prépondérant, non seulement dans les procédures de contestation de validité et d’exequatur de la sentence arbitrale, ce qui lui est classique, mais également sur l’opérationnalité des clauses de renonciation au recours contre la sentence. La réforme, tout en apportant une évolution par rapport aux textes de 1999, n’a cependant pas permis une clarification des contours précis de la notion. Ce qui peut avoir des effets néfastes sur la sécurité juridique et judiciaire, la notion pouvant servir d’obstacle rédhibitoire à l’exécution des sentences arbitrales. La CCJA a eu à connaitre, ces deux dernières décennies, d’une multitude de cas dans lesquels le concept a reçu application. On notera que malgré un significatif éclairage sur le sujet, sa  jurisprudence a laissé des zones d’ombre sur certains aspects importants. L’intensité de ses lumières est alors appelée à être revue à la hausse pour le grand bien de l’arbitrage dans l’espace OHADA.

 

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Dès le texte fondateur de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, les pères de cette œuvre aujourd’hui en vogue dans le monde[2], ont clairement formulé le vœu de promouvoir en Afrique l’arbitrage comme mode privilégié de règlement des différends[3]. Or, il n’y a pas d’arbitrage crédible sans possibilité d’exécution forcée des sentences arbitrales. Qui parle d’exécution forcée de sentence arbitrale fait nécessairement référence à la reconnaissance et à l’exequatur de la sentence, l’arbitre n’ayant pas d’imperium[4]. L’ordre public international est l’un des obstacles possibles à cette onction du juge étatique nécessaire à la sentence arbitrale, en l’occurrence lorsqu’il y a contrariété entre celle-ci et celui-là. Pouvant ainsi faire échec à l’exécution d’une sentence arbitrale, ce concept gagnerait à avoir des contours bien précis. Tel ne semble pas être le cas en l’état actuel du droit de l’arbitrage OHADA[5].

S’il y a une notion aussi hétéroclite que fugace en droit, c’est bien celle de l’ordre public[6]. Jean Baptiste RACINE le présente comme « un standard du droit aux contours flous, imprécis et évolutif[7] ». Dans son sens général, l’ordre public désigne, pour un pays donné, l’état social à un moment donné dans lequel la paix, la tranquillité et la sécurité publique ne sont pas troublées[8]. Ce sens que prend la notion en droit public ne nous intéresse pas ici. En droit privé, le terme sert plutôt à caractériser certaines règles qui s’imposent avec une force particulière et, par extension, à désigner l’ensemble des règles qui présentent ce caractère[9]. Il s’agit de normes impératives dont les individus ne peuvent s’écarter, ni dans leur comportement, ni dans leurs conventions. Il est enseigné que ces normes correspondent à l’ensemble des exigences fondamentales sociales, politiques, économiques entre autres, considérées comme essentielles au fonctionnement des services publics, au maintien de la sécurité ou de la moralité, à la marche de l’économie ou à la sauvegarde de certains intérêts particuliers primordiaux. On a ainsi pu dire de cette notion qu’elle est le rocher sur lequel se construit la société[10]. Il arrive également que dans le silence des textes, le juge confère à une disposition un caractère d’ordre public, s’il estime que le respect de ladite disposition est nécessaire à la sauvegarde des intérêts primordiaux de la société[11]. Il en résulte que le contenu de l’ordre public au plan interne, peut varier d’un pays à un autre ou d’une société à une autre.

Notion de droit international privé, l’ordre public international encore désigné ordre public au sens du droit international privé est une création prétorienne qui renvoie à l’ensemble des principes écrits ou non, qui sont, au moment où l’on raisonne, considérés dans un ordre juridique, comme fondamentaux et qui, pour cette raison, imposent d’écarter l’effet, dans cet ordre juridique, non seulement de la volonté privée, mais aussi des lois étrangères et des actes des autorités étrangères[12]. C’est l’ordre public d’éviction qui permet au juge du for, d’écarter devant un conflit de lois, la loi étrangère normalement applicable au litige à lui soumis, ou de refuser la reconnaissance et l’exequatur à une décision judiciaire ou sentence arbitrale étrangère[13].

L’ordre public international, comme son nom ne l’indique pas, n’est donc pas véritablement international. Il s’agit des principes considérés en droit interne par le Juge du for, comme suffisamment fondamentaux pour s’imposer et faire écarter les lois et actes venus d’ailleurs. Il doit ainsi être distingué de l’ordre public transnational ou véritablement international[14]. Ce dernier concept désigne un ensemble de principes et valeurs sinon universellement, au moins largement admis dans le commerce international comme essentiels à la protection de ce commerce[15]. A titre d’exemple, il est de principe d’ordre public transnational qu’il est impossible pour un Etat de contracter et prendre des engagements de nature commerciale en signant une convention d’arbitrage pour régler tout différend y relatif, puis, se prévaloir après coup de son incapacité à compromettre suivant son droit interne[16]. Il en est de même de la prohibition de la corruption[17] ou des transactions immorales plus généralement[18].

 

L’ordre public international doit également être distingué de l’ordre public interne qui est une notion plus étendue[19]. Une règle d’ordre public international est d’abord d’ordre public interne mais l’inverse n’est pas toujours vrai[20]. Toutes les règles d’ordre public interne ne sont pas d’ordre public international[21]. Le domaine de ce dernier est donc tout entier inclus dans celui de l’ordre public interne[22].

Quoique de création prétorienne, la notion n’a pas été définie par la Jurisprudence. En droit de l’arbitrage international, la convention de New York du 10 juin 1958 sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales n’a fait allusion à la notion qu’en la rattachant à l’ordre public du for[23]. Du coup, seul le juge du for, apprécie dans une casuistique singulière, ce qui est contraire à « son ordre public international »[24] de ce qui ne l’est pas, pour reconnaitre et donner ou non force exécutoire à une sentence arbitrale étrangère dans son pays.

Le droit de l’arbitrage OHADA qui résulte du traité, du Règlement d’arbitrage de la CCJA et de l’Acte uniforme relatif à l’arbitrage (AUA), à sa naissance, est venu ajouter une couche à cette difficulté. Dans le droit antérieur à la réforme du 23 novembre 2017[25], le législateur avait en effet créé une difficulté supplémentaire dans son approche de la notion. Il semblait distinguer l’ordre public international communautaire de l’ordre public international des Etats parties. Alors que dans le traité, l’article 25-4 relatif à l’arbitrage CCJA citait une « sentence contraire à l’ordre public international » dans les cas dans lesquels l’exéquatur peut être refusé, l’article 26 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage du 11 mars 1999 disposait que « Le recours en annulation n’est recevable que (…) si le tribunal arbitral a violé une règle d’ordre public international des Etats signataires du Traité… ». De même, à l’article 30 du règlement d’arbitrage de la CCJA du 11 mars 1999, on lisait que l’exequatur ne peut être refusé et l’opposition à l’exequatur n’est ouverte que « si la sentence est contraire à l’ordre public international », au moment où dans l’article 31 de l’AUA de 1999, le législateur disposait que «  la reconnaissance et l’exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à une règle d’ordre public international des Etats parties ».

On pouvait donc remarquer que lorsqu’il s’agit de l’arbitrage CCJA, le législateur parlait d’  « ordre public international » alors que dans l’arbitrage de droit commun, c’est tantôt « ordre public international des Etats parties », tantôt « ordre public international des Etats signataires du Traité ». Quand certains auteurs y voyaient simplement une maladresse de rédaction[26], d’autres en revanche en ont déduit une approche dualiste de la notion[27].

Il revenait à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage chargée de donner un contenu uniforme aux règles de l’OHADA d’apporter la lumière. Malgré bien d’occasions qui se sont présentées, l’œuvre prétorienne de la haute Cour n’a pas permis de lever tout équivoque.

Avec l’adoption d’un nouvel Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage et  d’un nouveau Règlement d’arbitrage de la CCJA le 23 novembre 2017, le législateur, sans toujours définir le concept, a apporté à sa copie de 1999, une légère modification qui, suivant les diverses appréhensions, pourrait sensiblement changer son approche de la notion.

Cependant, les questions substantielles demeurent. Quel est le contenu réel de cette notion ? Quels en sont les contours ou au moins les critères d’appréciation ? S’agit-il d’un ordre public commun aux Etats membres ou d’une juxtaposition de plusieurs ordres publics, chaque Etat partie avec le sien ? Quels éléments de réponse à ces questions  peut-on tirer des différentes décisions de la CCJA ?

En droit comparé, les conceptions divergent d’un pays à un autre malgré des ressemblances. Alors que le droit français par exemple, suivi par le droit suisse, distingue clairement l’arbitrage interne et l’arbitrage international avec la référence à l’ordre public interne dans le premier cas[28] et à l’ordre public international dans le second[29], le droit anglais avec l’Arbitration Act adopte la conception moniste et exige la conformité des solutions arbitrales à l’ordre public sans qualificatif[30]. Ainsi, s’il résulte de la comparaison des droits étatiques que le contrôle de la conformité de la sentence à l’ordre public est toujours prévu[31], l’approche donnée à la notion et les modalités du contrôle ne sont pas toujours les mêmes.

L’objectif de la présente étude est de mettre en exergue tout en en relevant les insuffisances l’apport d’une part de l’intervention du législateur OHADA de novembre 2017 et d’autre part de la CCJA dont le rôle est de plus en plus croissant dans l’univers du droit africain des affaires. Ce qui est d’autant plus important que l’arbitrage en Afrique est encore loin de faire l’unanimité. Or, l’un des objectifs affichés des pères fondateurs de l’OHADA était d’apporter par le truchement de ce mode alternatif de règlement des différends, une contribution notable à la sécurité judiciaire dans les Etats parties. Ce qui passe évidemment par la mise en place des conditions nécessaires à l’exécution effective des sentences arbitrales dans ces Etats. Si cette exécution est susceptible d’être mise à mal en raison du flou qui peut entourer une notion comme celle de l’ordre public international consacrée par le législateur, les effets tangibles d’un pan entier de l’œuvre d’attractivité par le Droit seraient sensiblement remis en cause. Il y a ainsi un intérêt certain à préciser les contours de cette notion pour qu’elle ne soit pas utilisée comme un refuge par les contractants de mauvaise foi, soucieux de se soustraire à leurs engagements. Cet enjeu se trouve amplifié par l’une des nouveautés de la réforme de 2017. Il s’agit de l’érection de la conformité de la sentence à l’ordre public international en condition de validité des clauses de renonciation des parties au recours en annulation. En effet, depuis cette réforme, les parties peuvent convenir de renoncer au recours en annulation de la sentence arbitrale, à la condition que celle-ci ne soit pas contraire à l’ordre public international[32]. En d’autres termes, l’ordre public international devient cette passerelle qui permet de ressusciter la voie du recours en annulation à laquelle les parties ont renoncé dans la convention d’arbitrage[33].

A l’analyse, la contribution du législateur de 2017 n’a pas totalement clarifié la notion malgré les apparences. En revanche, avec méthode et patience, la Cour commune apporte pas-à-pas des éléments de réponse qui  éclairent, nonobstant des zones d’ombre qui laissent perplexe. Le panorama des interventions de la loi comme du juge montre ainsi un clair-obscur (I) et un éclairage mitigé (II).

 

 

 

I-                   Le clair-obscur de l’évolution législative

Avec la réforme du 23 novembre 2017, les notions d’ordre public international « des Etats signataires du Traité » et d’ordre public international « des Etats parties » disparaissent au profit de l’ordre public international tout court. Les articles de l’acte uniforme sont ainsi  alignés sur ceux du Traité et du Règlement d’arbitrage de la CCJA. A première vue, cette « retouche » peut faire penser à la volonté du législateur de mettre fin aux polémiques ou de corriger sa « maladresse de rédaction » de 1999. Mais en poussant plus loin l’analyse, il est possible de se demander s’il ne s’agit pas plutôt d’un passage d’une approche dualiste à une approche unitaire de la notion d’ordre public international. Cette dernière approche, hélas, n’enlève rien à la nébuleuse qui peut toujours continuer à servir comme un dernier rempart aux mauvais perdants. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la clarification voulue (A) n’a pas totalement fait disparaître l’obscurité constatée (B).

 

A- La clarification voulue

En Droit de l’arbitrage international, la question s’était déjà posée de savoir par référence à quel ordre public le juge, saisi d’une demande d’exequatur ou d’un recours en annulation, analysera la sentence étrangère qui lui est soumise : ordre public interne ? Ordre public international ou ordre public transnational ?

En droit OHADA, alors que la question se pose pratiquement dans les mêmes termes, le législateur semblait distinguer selon que l’on se trouve devant le Juge national ou devant la CCJA. En tout cas, c’est ce qui pouvait être observé, avant novembre 2017, dans la différence de rédaction entre les articles 25-4  du traité, 29-2 et 30.6 du Règlement d’arbitrage de la CCJA qui régissent uniquement l’arbitrage institutionnel CCJA d’une part, et les articles 26 et 31 de l’AUA qui traitent, de leur côté, de l’arbitrage de droit commun d’autre part [34].

Aux termes de l’art 25-4 du traité en effet, « L’exequatur ne peut être refusé que dans les cas suivants : (…) Si la sentence est contraire à l’ordre public international ». De même, le Règlement d’arbitrage de la CCJA en son article 30.6 dispose que « L’exequatur ne peut être refusé et l’opposition à l’exequatur n’est ouverte que dans les cas suivants : …si la sentence est contraire à l’ordre public international ».

Dans l’AUA de 1999 en revanche, s’agissant du recours en contestation de validité de la sentence, le législateur disposait à l’article 26 que « Le recours en annulation n’est recevable que dans les cas suivants : …si le Tribunal arbitral a violé une règle d’ordre public international des Etats signataires du Traité ». Plus loin, en ce qui concerne l’exequatur de la sentence, l’article 31 énonce que « La reconnaissance et l’exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à une règle d’ordre public international des Etats Parties ».

Cette différence de rédaction a été diversement appréciée par la doctrine. Alors que le Professeur POUGOUE y voyait « une simple nuance de rédaction » pour ne pas dire une erreur matérielle[35], d’autres ont voulu la lier à la dualité du système d’arbitrage de l’OHADA[36]. D’aucuns ont même pu se demander s’il ne s’agissait pas « des ordres publics en désordre »[37].

Suivant l’appréhension dualiste, la notion d’ordre public international serait différemment entendue par le législateur selon que l’on est dans l’arbitrage CCJA ou dans l’arbitrage de droit commun. Dans l’arbitrage CCJA, c’est celle-ci qui a le monopole de l’appréciation de  la conformité de la sentence à l’ordre public international[38]. Les juges de la CCJA dans cette œuvre de protection de l’ordre public doivent nécessairement avoir en vue tout l’espace juridique que régissent les dispositions du droit OHADA. Ceci étant, cet ordre public international ne peut être que communautaire. En revanche, en droit commun de l’arbitrage, c’est le juge de l’Etat où l’exécution de la sentence est poursuivie qui est compétent pour en contrôler la conformité à l’ordre public[39].

Le législateur a donc, à la faveur de la réforme de 2017, purement et simplement supprimé ce qui était à l’origine de la controverse dans les articles 26 et 31 de l’AUA. Aussi bien dans l’arbitrage CCJA que dans l’arbitrage de droit commun, on retrouve désormais « ordre public international » sans autre précision. On en vient ainsi, pourrait-on dire, à l’adoption d’une approche désormais unitaire de la notion.

Au regard des débats suscités par les différences de rédaction dans les textes de 1999, on peut aisément déceler la volonté du législateur d’apporter, par cette approche, une clarification à la  notion.

Il est cependant possible de s’interroger sur la pertinence de cette approche. L’ordre public international dans l’arbitrage CCJA et l’ordre public international dans l’AUA doivent-ils avoir nécessairement un même contenu ? Cette question mérite d’être posée surtout quand on sait que ce n’est pas le même juge qui est a priori appelé à en assurer la protection.

Malgré la différence de rédaction d’avant 2017, certains auteurs étaient déjà en faveur de l’approche unitaire. Gaston KENFACK soutenait que l’ordre public international prévu par l’OHADA « est en réalité un ordre public communautaire épousant les contours de l’espace OHADA sans ignorer les préoccupations internationales en la matière »[40]. Dans le même sens, Philippe FOUCHARD quoique moins précis, affirme qu’il s’agit d’un « ordre public unifié, communautaire, donc un ordre public international pour tous les Etas de l’OHADA.. »[41].

Ce point de vue est discutable. D’un côté, l’ordre public international visé dans le Traité et le règlement d’arbitrage de la CCJA ne peut pas être que communautaire. L’ordre public communautaire renferme en effet d’une part, les règles impératives de l’OHADA et les principes sinon universellement au moins largement partagés dans le commerce international ainsi que les principes fondamentaux du procès. Or, l’arbitrage CCJA peut bien être un arbitrage interne, c’est-à-dire opposant deux personnes ressortissant d’un même Etat avec application au fond du litige du droit de cet Etat, pourvu qu’elles aient choisi la CCJA comme centre d’arbitrage. Dans une telle hypothèse, la sentence rendue aura vocation à être exécutée dans cet Etat. La CCJA ne saurait apprécier la conformité de cette sentence à l’ordre public dit communautaire en ignorant l’ordre public international de cet Etat[42]. L’ordre public dans l’arbitrage CCJA est donc aussi bien communautaire que « national »[43]. De l’autre côté, l’ordre public international prévu dans l’AUA ne peut être strictement « national » quoiqu’il revienne au juge national d’apprécier la conformité de la sentence à son égard. Celle-ci peut bien être conforme aux exigences fondamentales de la société de ce juge et attenter à des règles impératives de l’espace communautaire. Il est ainsi à la fois « national » et communautaire.

L’intervention du législateur est donc, de ce point de vue, heureuse. L’uniformisation de la notion parait pertinente pour peu que son contenu ne soit pas circonscrit aux règles impératives du législateur OHADA en faisant l’impasse sur les ordres juridiques nationaux. En effet, « Le droit matériel OHADA ne concerne que quelques matières, à la différence de l’arbitrage qui vise tous les droits disponibles d’après l’article 2 alinéa 1 de l’AUA, ou les différends contractuels ayant un lien géographique avec l’espace OHADA »[44]. De la sorte, il existe bien de règles impératives nationales sur des matières non-traitées par le droit OHADA mais soumises à des arbitres, si bien qu’  « il sera difficile », écrit Martial AKAKPO, « de revendiquer que l’ordre public se résume au consensus régional sur les règles impératives »[45].

Au demeurant, l’intervention du législateur de 2017, si elle a réussi à mettre fin à une polémique, n’a guère apporté, en réalité, des éléments de réponse évidents sur les contours précis de la notion. Celle-ci demeure dès lors fugace et peut toujours continuer de servir de prétexte ou de « grief fourre-tout »[46] aux mauvais perdants dans les litiges arbitraux, surtout les Etats.

 

B- L’obscurité maintenue

La question de l’ordre public international soulevait suffisamment d’interrogations pour qu’on attendît  de l’intervention du législateur de 2017 plus que ce qu’il donna finalement.

La seule évolution remarquable après la réforme de 2017 réside dans la référence à « l’ordre public international » dans tous les textes relatifs au recours en annulation  ou à l’exequatur des sentences arbitrales, abstraction faite du type d’arbitrage en présence. Le régime juridique de l’exequatur ou de la contestation de validité est désormais unitaire, que la sentence soit rendue dans un arbitrage de droit commun ou dans un arbitrage CCJA.

Au-delà de ce constat, plusieurs questions demeurent non résolues.

Pour commencer, rappelons que l’ordre public en matière d’arbitrage en tant que limite aux activités de cette matière peut avoir trois conceptions différentes. Ou l’on applique à l’arbitrage interne et à l’arbitrage international un standard différent d’ordre public, c’est-à-dire l’ordre public international à l’arbitrage international, l’ordre public interne à l’arbitrage interne ; ou l’on applique le standard de l’ordre public interne ou de l’ordre public international à la fois à l’arbitrage interne et à l’arbitrage international[47]. Autrement dit, on applique l’ordre public interne uniquement à l’arbitrage interne et l’ordre public international exclusivement à l’arbitrage international, selon la première conception[48]. Dans la deuxième, on fait appel à l’ordre public interne à la fois dans l’arbitrage interne et dans l’arbitrage international. Enfin, dernière conception, on applique le standard de l’ordre public international à la fois à l’arbitrage international et à l’arbitrage interne.

En retenant la notion d’ordre public international aussi bien dans le Traité et le Règlement d’arbitrage CCJA que dans l’AUA, sans distinction aucune, le législateur de l’OHADA, a, semble-t-il, manifesté sa préférence à la troisième conception. Le standard de l’ordre public international serait applicable à la fois dans l’arbitrage international et dans l’arbitrage interne lorsqu’il s’agit de contrôler la validité de la sentence ou d’en accorder l’exequatur. Cette compréhension de l’approche du législateur de l’OHADA est la plus plausible à notre avis dans la mesure où les articles 26 et 31 de l’AUA  sont applicables « à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l’un des Etats Parties »[49]. Or, avec ce critère du siège du tribunal arbitral, le champ d’application du texte s’étend à tout type d’arbitrage, notamment interne comme international[50].  Le législateur n’a nulle part distingué arbitrage interne et arbitrage international[51]. Le droit uniforme OHADA de l’arbitrage ne contient aucune règle particulière relativement à certains arbitrages qui seraient de droit international privé en fonction de certains critères à définir. « Une telle approche unitaire  a évidemment, le mérite », selon Pierre MEYER « de rendre inutile une définition de l’internationalité de l’arbitrage »[52].

On peut estimer que le législateur gagnerait à préciser le fond de sa pensée.

La première question qui demeure non résolue en pratique est de savoir quelle doit être la posture du juge national de la reconnaissance ou de l’exequatur devant une sentence rendue dans un arbitrage interne ? Dans le cadre du recours en annulation, l’article 26 de l’acte uniforme lui demande, entre autres conditions, de ne recevoir ce recours que « si la sentence arbitrale est contraire à l’ordre public international ». S’agissant de l’exequatur, l’article 31 édicte que « la reconnaissance et l’exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à l’ordre public international ». L’ordre public auquel la sentence ne peut porter atteinte est-il l’ordre public au sens du droit international privé de cet Etat où la reconnaissance ou l’exequatur est requis ? S’agit-il au contraire d’un ordre public commun à tous les Etats de l’OHADA, c’est-à-dire d’un ordre public régional en quelque sorte ? Plus spécifiquement, prenons l’hypothèse d’un arbitrage interne dont la sentence soumise à l’exequatur du juge national heurte de front une règle d’ordre public de l’Etat de ce juge. Peut-il accorder l’exequatur en tenant le raisonnement suivant lequel la seule référence que lui impose l’article 31 de l’AUA est l’ordre public international et non pas l’ordre public interne, étant rappelé que ce dernier a un domaine plus vaste que celui de l’ordre public international[53] ?

Inversement, dans un arbitrage international, par référence à quelles valeurs fondamentales le juge national de l’exequatur devra vérifier la conformité de la sentence? Celles de la société de son Etat[54] ? Ou celles de tout l’espace OHADA ?

Analysant l’ancien texte, le professeur MEYER estimait que «  le fait que l’acte uniforme évoque l’ordre public international des Etats parties et non de l’Etat partie incline à penser que la deuxième interprétation doit être retenue. Ensuite, le fait que la décision qui refuse l’exequatur n’est passible que d’un pourvoi en cassation devant la CCJA implique que cet ordre public devrait plutôt être concrétisé d’un point de vue régional ou communautaire plutôt que d’un point de vue national »[55].  A l’aune d’une telle analyse, la question se pose de savoir si la suppression de la portion « des Etats parties » signifierait que le législateur exclut désormais l’interprétation qui voit un caractère communautaire ou régional dans l’ordre public international visé dans l’AUA.

En outre, une autre interrogation est suscitée par l’adverbe « manifestement » utilisé par le législateur dans l’article 31 de l’AUA. On sait que cet adverbe n’apparaît pas dans le traité, ni dans le Règlement d’arbitrage, ni même dans l’article 26 de l’AUA, fondement du recours en annulation de la sentence. Quelle est donc la portée de ce mot qu’on ne retrouve que dans le régime de l’exequatur dans l’arbitrage de droit commun ? Même le pendant de cet article dans le régime de l’exequatur d’une sentence CCJA, en l’occurrence l’article 30.5 du Règlement d’arbitrage n’y fait pas référence. Le législateur voulait-il dire que toutes les violations de l’ordre public international, lorsqu’on est présence d’un arbitrage de droit commun, ne font pas obstacle à l’exequatur et que seules les violations « manifestes » devraient être prises en compte par le juge[56] ? S’agit-il plutôt d’un simple glissement d’un mot surabondant et sans aucune portée ? Dans la première hypothèse, qu’est-ce qui caractériserait la violation « manifeste » ? Qu’est-ce qui justifierait cette différence de traitement s’agissant de l’intensité du contrôle de la sentence par le juge de l’exequatur, selon qu’on soit dans l’arbitrage CCJA ou dans l’arbitrage de droit commun[57] ?

Toutes ces interrogations nourrissent au demeurant le flou, voir le mystère qui entoure la notion et son régime. Ce qui profite hélas aux mauvais perdants.

En effet, la partie perdante dans un différend tranché par le tribunal arbitral est souvent tentée de remettre en cause la sentence par tous les moyens. Deux options lui sont offertes. Soit un recours en annulation, soit un recours en révision. Ce dernier n’est ouvert qu’en cas de découverte d’un fait nouveau de nature à exercer sur la solution du litige une influence décisive et qui, avant le prononcé de la sentence, était inconnu du tribunal arbitral et de la partie qui demande la révision.[58]

En l’absence d’un tel fait, la partie perdante, souvent lorsqu’il s’agit de l’Etat ou des structures étatiques, n’hésite pas à exhiber la contrariété de la sentence à l’ordre public international pour en contester la validité ou en refuser l’exequatur dans le cas d’un arbitrage de droit commun. Profitant de l’imprécision entourant la notion, il est  très facile d’en faire un « fourre-tout » dès que les intérêts en jeu « justifient » la démarche.

Deux illustrations.  

Dans la première,  il s’agit d’une affaire ayant opposé l’Etat du Bénin à la société BENIN CONTROL S.A. Les deux parties ont conclu un contrat de prestation de service en date du 09 février 2011 aux termes duquel la société Bénin Control S.A. devait assurer, moyennant rémunération, les fonctions entre autres d’inspection avant embarquement des marchandises, de fourniture, mise en service et exploitation de scanners à rayons X, de fourniture, mise en service et exploitation d’un système de suivi électronique du transit à l’aéroport de Cotonou. Après plusieurs péripéties, l’Etat du Bénin notifiait à son cocontractant la suspension provisoire dudit contrat par correspondance du 02 mai 2012. Mettant en œuvre la clause d’arbitrage dudit contrat, la société Bénin Control saisissait le centre d’arbitrage de la CCJA d’une demande d’arbitrage ayant abouti à la constitution d’un tribunal arbitral. Par une sentence rendue le 13 mai 2014, ce tribunal, entre autres dispositions, condamne l’Etat du Bénin à réparer le préjudice causé à la société demanderesse du fait de la suspension jugée abusive du contrat, lui enjoint de reprendre et de poursuivre l’exécution du contrat dans un délai de soixante (60) jours et à défaut, de payer à la société demanderesse, la somme de FCFA 129.000.000.000 au titre de manque à gagner qu’elle aura subi. Alors que la société Bénin Control saisissait la CCJA quelques jours plus tôt aux fins d’exequatur de cette sentence, l’Etat du Bénin, par requête en date du 30 mai 2014 introduisait un recours en contestation de validité de la même sentence. Entre autres moyens, l’Etat du Bénin, soutenait que la sentence attaquée aurait violé l’ordre public international en ce que, le tribunal arbitral a sanctionné le fait que le contrat en cause ait été suspendu par décret pris souverainement par cet Etat. Pour ce dernier en effet, il est contraire à l’ordre public béninois et international[59] qu’une sentence arbitrale ordonne à un Etat souverain de reprendre et de poursuivre l’exécution d’un marché conclu avec un particulier au détriment de l’intérêt général.

On peut comprendre aisément que l’Etat du Bénin voulait, en usant de la notion d’intérêt général, faire couvrir sa violation du contrat librement conclu, par l’ordre public international[60].

Les juges de l’instance suprême de l’OHADA lui ont répondu que le tribunal arbitral, en enjoignant à l’Etat de surseoir à l’exécution de sa décision de suspension du contrat qu’il a librement conclu ou d’avoir à réparer les effets de son acte, n’enfreint en rien les prérogatives régaliennes de l’Etat et ne contrarie pas l’ordre public international.

Dans la seconde affaire, il s’est agi également d’une violation de ses engagements contractuels par un Etat, le Mali. Dans un différend qui l’a opposé au groupe TOMOTA S.A., le tribunal arbitral saisi par ce dernier l’a condamné à réparer les préjudices causés du fait de ses comportements dolosifs et déloyaux dans l’exécution d’un ensemble contractuel. Sous le couvert une fois encore d’une violation de  l’ordre public international, l’Etat malien voulait faire juger à nouveau le fond de l’affaire[61], ne voulant pas s’avouer vaincu. La réponse, ici également de la CCJA a été cinglante. « Mais attendu que, pour retenir la responsabilité de l’Etat du Mali qui s’est engagé contractuellement à assister l’acquéreur dans la conclusion d’un contrat commercial de fourniture de grain de coton avec la CMDT, le tribunal arbitral a procédé à l’analyse des éléments en liaison avec la convention litigieuse conclue entre l’Etat du Mali et le groupe TOMOTA S.A., produits et débattus contradictoirement par les parties ; qu’il en a déduit, en s’appuyant sur la loi malienne, que l’Etat a manqué à ses obligations contractuelles et l’a condamné à réparer les dommages subis par TOMOTA ; que dès lors, la sentence arbitrale n’est en rien contraire à l’ordre public international et le motif doit être rejeté »[62].

La notion intervient donc comme le dernier rempart, lorsque tous les moyens de défense sont épuisés. Le seul mérite de ces saisines de la CCJA sur la base d’une supposée violation de l’ordre public international est qu’elles ont apporté du grain à moudre à la CCJA appelée à remplir les vides laissés par le législateur et à faire dissiper, par ses lumières, ombres et doutes.

Son éclairage reste cependant mitigé malgré biens d’avancées.

 

II-                L’éclairage mitigé des interventions jurisprudentielles

Il est généralement admis qu’il est impossible de définir légalement l’ordre public qu’il soit interne ou au sens du droit international privé. C’est un véritable serpent de mer. C’est au Juge, selon l’expression empruntée à Pierre MEYER, qu’il revient d’exprimer dans des situations particulières, la conscience juridique de la société[63]. Beaucoup avaient donc émis très tôt le vœu de voir la CCJA donner un contenu à la notion d’ordre public international au sens du législateur OHADA[64]. Ces quinze dernières années, malgré la rareté des litiges déférés devant elle, la haute juridiction communautaire a eu amplement  l’occasion d’apporter sa lumière. Sans exhaustivité, on sait désormais que certaines solutions des arbitres sont attentatoires à cet ordre public international et d’autres non, preuves d’une évolution certaine sur le contenu de la notion (A). Des incertitudes demeurent toutefois quant au domaine de l’ordre public international et ses frontières avec l’ordre public interne, malgré des occasions de clarification qui se sont présentées (B).

 

 

 

A-     Des avancées certaines sur le contenu de l’ordre public international

Les litiges soumis à la CCJA ont permis d’identifier certaines solutions des arbitres comme attentatoires à l’ordre public international (1) et d’autres non (2).

1-     Les cas d’atteinte à l’ordre public international

La CCJA a eu à poser comme principe que le recours en contestation de validité de la sentence fondé sur la violation de l’ordre public international doit expliciter en quoi la sentence est contraire à cet ordre public international[65]. On note parmi les cas de violation, les atteintes aux prérogatives régaliennes de l’Etat et les atteintes à la stabilité juridique.

a- Les atteintes aux prérogatives régaliennes de l’Etat

Dans l’arrêt n°103/2015 du 15 octobre 2015 sus évoqué, la Cour commune décide qu’une sentence arbitrale qui, sans annuler un décret pris souverainement par un Etat pour suspendre l’exécution d’un contrat, enjoint à cet Etat de surseoir à l’exécution de sa décision de suspension du contrat ou d’avoir à réparer les effets de son acte, n’est pas attentatoire à l’ordre public international.  Ce qui sauve cette sentence est assurément le fait d’avoir ménagé le décret. Si ce dernier avait été annulé, la sentence tomberait dans le giron d’une prérogative régalienne de l’Etat et serait ainsi contraire à l’ordre public international.

Cette lecture a été confirmée le même jour par un autre arrêt de la CCJA.

Il s’agit d’une affaire ayant opposé encore une fois l’Etat du Bénin à la société Commune de Participation (SCP) et au sieur Patrice TALON. L’Etat du Bénin avait procédé à la libéralisation de la filière coton et a lancé un appel d’offres qui a abouti à la conclusion d’un contrat avec la société SCP dont le capital est détenu en totalité par Monsieur Patrice TALON. Il prendra plus tard une série d’actes règlementaires dont un décret n°2013-485 remettant en cause ce contrat. La SCP et Monsieur Patrice TALON saisirent alors le centre d’arbitrage de la CCJA d’une demande d’arbitrage après échec d’une tentative de règlement amiable. Le 13 mai 2014, le tribunal arbitral, après avoir constaté les manquements et la faute contractuelle de l’Etat du Bénin ainsi que les préjudices en résultant pour la SCP et Monsieur Patrice TALON, entre autres décisions, déclare le décret n°2013-485 nul et de nul effet sur la convention des parties et par conséquent décide que ladite convention n’est pas suspendue du fait de ce décret, condamne l’Etat du Bénin à payer aux demandeurs diverses sommes à divers titres. L’Etat condamné saisit la CCJA d’un recours en contestation de validité pour trois motifs, dont la contrariété de la sentence à l’ordre public international. Sur ce point, il fait grief en effet au tribunal arbitral d’avoir violé l’ordre public international en ce qu’il a, non seulement fait injonction à l’Etat d’exécuter une obligation, notamment de laisser poursuivre l’exécution du contrat, mais surtout en allant plus loin pour annuler le décret n° 2013-485 pris par un Etat souverain. Par un arrêt du 15 octobre 2015, la CCJA donne raison à l’Etat du Bénin en décidant que « s’il est constant qu’une juridiction arbitrale est compétente pour connaître des litiges engendrés par l’exercice par un Etat de ses prérogatives de puissance publique, autant que cet Etat peut recourir à l’arbitrage relativement à ses droits, ce pouvoir juridictionnel ne doit se limiter qu’à la question des réparations dues à une personne physique ou morale privée, consécutives à des dommages résultant de l’exercice de ces prérogatives de puissance publique, sans avoir à juger de la validité des actes pris par l’Etat dans l’exercice de ses prérogatives. En l’espèce, la sentence arbitrale du 13 mai 2014, au lieu de ne se limiter qu’aux condamnations pécuniaires, a déclaré que « le décret n°2013-485 du 18 novembre 2013 est de nul effet sur la convention de création de la SODECO.. ». Ce faisant, cette sentence a contrarié l’ordre public international »[66].

On retiendra que suivant cet arrêt, l’atteinte par une sentence arbitrale aux prérogatives de puissance publique d’un Etat est une violation de l’ordre public international. Ce qui est permis, c’est la sanction par la sentence de l’exercice dommageable de ces prérogatives de puissance publique de l’Etat et sa condamnation au paiement de sommes d’argent à son cocontractant ayant subi les dommages[67].

b- Les atteintes à la stabilité juridique

Si l’atteinte à l’autorité de la chose souverainement décidée est violation de l’ordre public international, l’atteinte à l’autorité de la chose jugée l’est tout autant. Ceci résulte d’un arrêt rendu par la CCJA le 31 janvier 2011[68]. Dans cette espèce opposant la société PLANOR AFRIQUE SA à la société ATLANTIQUE TELECOM SA, le tribunal arbitral a rendu une sentence tranchant notamment un différend portant sur la cession forcée d’actions entre les parties, toutes deux actionnaires dans la société TELECEL FASO alors que la Cour d’Appel de Ouagadougou, par arrêt en date du 19 juin 2009 avait déjà rendu une décision dans la même cause opposant les mêmes parties et qui a acquis l’autorité de la chose jugée. La société PLANOR, perdante devant le tribunal arbitral a formé un recours en contestation de validité de la sentence en évoquant la violation de l’ordre public international du fait de l’atteinte à l’autorité de la chose jugée par la Cour d’Appel de Ouagadougou. Ce moyen fait écho devant la CCJA qui décide que « l’autorité de la chose jugée, principe fondamental de la justice en ce qu’il assure la sécurité juridique d’une situation acquise, participant de l’ordre public international au sens des articles 29.2 et 30.6-4 du règlement d’arbitrage de la CCJA, s’oppose à ce que l’arbitre statue dans la même cause opposant les mêmes parties. En conséquence, en statuant à nouveau sur la demande de cession forcée des mêmes actions, la sentence du tribunal, qui porte ainsi atteinte à l’ordre public international, doit être annulée ». Cette solution vient d’être confirmée par un arrêt du 27 février 2020[69].

Dans la même veine de la sécurité juridique, il a été jugé qu’une sentence qui porte atteinte au principe de la stabilité juridique qui interdit un renouvellement infini du procès est contraire à l’ordre public international[70].

Au contraire, certaines solutions des arbitres quoique parfois sanctionnables sur d’autres fondements, ne violent pas l’ordre public international.

2-     Les solutions non-attentatoires à l’ordre public international

Il n’y a rien de plus naturel en droit que la condamnation d’une partie, à un contrat, fût-elle un Etat, à réparer les dommages causés à son cocontractant par sa défaillance dans l’exécution du contrat.

Les deux arrêts précités du 15 octobre 2015 dans l’affaire Bénin Control S.A. C/ Etat du Bénin et 23 avril 2015 opposant l’Etat du Mali au groupe TOMOTA S.A. l’illustrent parfaitement bien. Dans ces deux affaires les deux Etats se sont montrés défaillants dans l’exécution de leurs engagements contractuels, lesquelles défaillances ont causé préjudices aux personnes privées en relations contractuelles avec eux. Il est évident qu’une telle lecture de la notion d’ordre public international est salutaire pour la sécurité juridique et a des répercussions positives sur l’économie des Etats de l’espace OHADA. En effet, s’il était permis aux Etats de violer leurs engagements contractuels pour se retrancher derrière l’ordre public international et refuser de réparer les dommages causés à leurs partenaires privés, les partenariats public-privé, qui constituent un important canal d’investissement dans nos Etats recevraient un sérieux coup quant à la garantie de sécurité de ces investissements.

Ce qui est valable pour les engagements conclus directement avec l’Etat l’est a fortiori pour ceux qui mettent en relation une personne privée et une société d’Etat ou une société d’économie mixte. Dans une affaire ayant opposé la société Nationale pour la Promotion agricole dite SONAPRA, société d’Etat de droit béninois et la société des Huileries du Bénin dite SHB, la CCJA a admis encore la faculté pour les arbitres de condamner la société d’Etat à payer des dommages-intérêts au cocontractant victime de violation des engagements contractuels. Dans cette affaire, la partie « étatique » contestataire de la sentence la condamnant, à court de moyen, n’a même pas précisé en quoi, il y avait selon elle, violation de l’ordre public international. Tout naturellement, son recours en contestation a été rejeté[71].

Sur un autre plan, il a été jugé que ne viole pas l’ordre public international la sentence qui souffre d’un défaut de motivation[72] et dans laquelle les arbitres ont outrepassé leur pouvoir, en statuant en amiable-compositeur sans pouvoir des parties[73]. Certes, constituent des manquements le fait pour les arbitres de ne pas motiver leur sentence et d’outrepasser l’étendue de leur mission, mais ces manquements ne sont pas sanctionnés sur le fondement de la violation de l’ordre public international. Sur ce point, la CCJA prend à contre-pied une partie de la doctrine qui voudrait voir dans le défaut de motivation de la sentence, une violation de l’ordre public communautaire procédural[74]. Cette analyse pèche en ce qu’elle occulte les dispositions de l’article 26 de l’AUA en ces points c) et f) qui condamnent de façon autonome le défaut de motivation de la sentence de même que le dépassement par l’arbitre de sa mission[75]. Dans le règlement d’arbitrage de la CCJA, il est de même sanctionné distinctement  le dépassement de sa mission par le tribunal arbitral et la violation de l’ordre public international. Considérer le défaut de motivation ou le dépassement de la mission de l’arbitre comme une  violation de l’ordre public international serait faire double emploi. Autant sanctionner ces manquements sans les couvrir par les tentacules de l’  « ogre public international ». C’est ce qu’a fait la CCJA dans l’arrêt du 19 juillet 2007. En retenant que ces manquements ne rendent pas la sentence contraire à l’ordre public international, la haute juridiction les a tout de même sanctionnés en annulant la sentence.

Enfin, signalons cet arrêt qui décide que le ministère d’avocat n’étant pas obligatoire dans une instance arbitrale, la sentence qui prend en compte les écritures déposées par un avocat condamné à une peine d’emprisonnement n’est en rien contraire à l’ordre public international[76].

Malgré ces avancées, l’œuvre de la CCJA reste perfectible notamment sur les frontières de la notion avec l’ordre public interne.

 

B-     Des occasions manquées sur la précision des rapports avec l’arbitrage interne

Une question importante demeure non-résolue malgré des opportunités de clarification qui se sont présentées. En droit OHADA, le domaine de l’ordre public international est-il circonscrit strictement à l’arbitrage de droit international privé ? Autrement posée, le moyen tiré de la violation de l’ordre public international peut-il être efficacement invoqué dans un arbitrage interne ?

En 2008, la CCJA a été saisie d’un litige opposant la Société nationale pour la promotion agricole (SONAPRA) à la Société des Huileries du Bénin (SHB). Les deux sociétés, toutes de droit béninois ont signé un contrat cadre d’approvisionnement en graines de coton, contrat aux termes duquel la SONAPRA devait fournir des graines de coton à la SHB. Le fournisseur n’a pas respecté ses obligations contractuelles. Conformément à la convention d’arbitrage signée entre les parties, qui contenait par ailleurs une clause-pallier, en l’occurrence un préalable de règlement amiable, la SONAPRA saisit la CCJA en invoquant notamment « la violation de l’ordre public international pour mauvaise interprétation de la clause de règlement amiable et mauvaise application de l’article 274 de l’acte uniforme sur le droit commercial général » relatif à la prescription, texte par ailleurs d’ordre public « communautaire ». Le problème s’est donc posé de savoir si dans le cadre d’un arbitrage purement interne, la violation de l’ordre public international peut être retenue comme moyen d’annulation de la sentence.

La CCJA retient péremptoirement « que ledit litige qui oppose deux sociétés de droit béninois relativement au commerce interne, relève de l’arbitrage interne ; que dès lors, c’est à tort qu’est invoquée la violation de l’ordre public international comme moyen d’annulation de la sentence rendue dans un tel arbitrage et qu’il échet de rejeter ledit moyen »[77]. Cette décision qui méconnait la conception moniste ou unitaire du régime juridique de l’arbitrage OHADA a été approuvée par certains auteurs[78]. D’autres n’ont pas manqué de la critiquer[79].

Pour notre part, il est difficile d’approuver cette solution. Au-delà de l’occasion manquée de définir la notion d’ordre public international[80], la solution pèche par son contenu. En effet, nous sommes dans un arbitrage interne institutionnel CCJA, le droit applicable au litige est le droit d’un Etat partie. La sentence viole un principe reconnu comme relevant de l’ordre public international, par exemple l’autorité de la chose jugée, qui est, par ailleurs, aussi d’ordre public interne. Le demandeur fonde son recours en annulation sur l’article 29.2-e) du règlement d’arbitrage de la CCJA selon lequel ce recours « n’est recevable que (…) si la sentence arbitrale est contraire à l’ordre public international ». On lui oppose le caractère interne de l’arbitrage pour rejeter sa demande, la violation de l’ordre public international ne pouvant pas à être invoquée dans le cadre d’un arbitrage interne. On lui demande ainsi de ne fonder son recours porté devant la CCJA que sur la violation de l’ordre public interne. Quel serait le fondement d’un tel recours en annulation quand on sait que les pays de l’espace OHADA n’ont pas autre droit de l’arbitrage interne que celui de l’OHADA ? Le demandeur à l’annulation peut-il trouver à son recours un fondement autre que celui de l’article 29.2 du règlement d’arbitrage ? La réponse négative parait évidente. Or, ce texte ne vise que « l’ordre public international ». L’analyse est valable même dans l’hypothèse d’un arbitrage de droit commun. L’on sait que le droit commun de l’arbitrage dans les Etats parties reste celui issu de l’acte uniforme[81] qui a abrogé toutes dispositions contraires de droit interne, antérieures ou postérieures[82]. L’on sait également que le régime de l’exequatur issu de cet acte uniforme n’a laissé qu’une petite marge aux législations internes, uniquement pour désigner la juridiction compétente[83]. Les règles de fond comme la procédure de l’exequatur sont organisées par l’acte uniforme. Dans ces conditions, quel autre texte que l’article 31 al 4 de cet acte uniforme[84] peut servir de base au juge national pour refuser l’exequatur ? Or, ce texte n’a visé que l’ordre public international. Le juge national peut-il refuser l’exequatur en se fondant sur la violation de l’ordre public interne là où le législateur ne l’a autorisé qu’en cas de contrariété à l’ordre public international[85] ? La question reste posée et mérite réflexion surtout lorsqu’on se rappelle que le domaine de l’ordre public interne est bien plus vaste que celui de l’ordre public international[86].

On comprend dès lors que le raisonnement qui limite le domaine de l’ordre public international à l’arbitrage international et renvoie à l’ordre public interne lorsqu’on est en présence d’un arbitrage interne, quoique partagée par des voix autorisées de la doctrine[87] conduit à une impasse[88]. C’est le moins que l’on puisse dire[89].

Nous estimons, comme précédemment démontré, que le législateur de l’OHADA n’a pas voulu éclater en deux le régime de l’exequatur et de la contestation de validité de la sentence en distinguant entre arbitrage interne et arbitrage international. « Le présent acte uniforme a vocation à s’appliquer à tout arbitrage [90] lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l’un des Etats partes », dispose l’article 1er de l’AUA. De même, dans le Traité, l’article 21  institue un critère principal, le caractère contractuel du différend et des critères complémentaires alternatifs fondés soit sur le domicile ou la résidence dans un Etat partie, soit l’exécution du contrat sur le territoire d’un Etat partie. On remarque ainsi que ni le régime de l’arbitrage CCJA, ni celui de l’arbitrage de droit commun n’ont distingué selon que l’arbitrage est interne ou international[91]. Nous partageons ainsi au passage l’avis de Me Martial Koffi AKAKPO qui écrit avec pertinence qu’ « en adoptant la conception moniste de l’arbitrage et en imposant la conformité de la sentence à l’ordre public international, (…) le législateur OHADA a clairement entendu s’éloigner de la représentation monolocalisatrice de l’arbitrage. Il n’y a donc pas de raison que l’ordre public diffère selon que le différend soit interne ou transfrontalier[92] ». 

Les suites de l’affaire SONAPRA nous donneront raison. En 2011 en effet, la Haute Cour de l’espace OHADA va réviser sa position lorsque la sentence définitive lui sera déférée. Ayant retenu la leçon à son corps défendant, la SONAPRA en saisissant une seconde fois la CCJA par un moyen tiré de la violation de l’ordre public a soigneusement évité d’ajouter le qualificatif « international ». Dans sa réponse, la cour régulatrice lui redonne ce qu’elle a laissé derrière elle en ces termes : « en l’espèce, aucun des moyens soulevés par le requérant ne figure au nombre des cas d’ouverture de contestation de validité sus-indiqués ; qu’en invoquant au premier moyen, la violation de l’ordre public, à supposer qu’elle soit considérée comme celle relative au fait que la sentence serait contraire à l’ordre public international, le requérant ne précise pas en quoi la sentence attaquée est contraire audit ordre public international… ». Ce qui va sans dire clairement que la Cour admet cette fois-ci que la violation de l’ordre public international pouvait être retenue si le requérant avait démontré en quoi cette violation a consisté. On était en présence des mêmes parties dans la même affaire, la première sentence déférée en 2008 étant une sentence partielle. Et pourtant la Cour a changé de raisonnement. En menant un raisonnement fondé sur la supposition que le recours qui fait référence à « l’ordre public » veuille parler de « l’ordre public international », la CCJA admet que seule la violation de cet ordre public dit international reste opérante sur le fondement de l’article 30.6 du Règlement d’arbitrage, exit tout recours à l’ordre public interne.

On peut imaginer le malaise de la SONAPRA et de ses Conseils qui ont certainement hésité entre ordre public international et ordre public interne au point de préférer finalement « ordre public » sans qualificatif.

Tout compte fait, la CCJA fera application une deuxième fois de l’ordre public international dans un arbitrage interne quelques années plus tard. Dans l’affaire Patrice TALON et la SCP contre l’Etat du Bénin abondamment commentée plus haut, les deux parties étaient de la même nationalité, le droit applicable au litige était le droit béninois et la sentence avait vocation à être exécutée au Bénin. Ce qui n’a pas empêché la Haute Cour à retenir la violation de l’ordre public international contre la sentence ayant annulé un décret pris souverainement par l’Etat du Bénin dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique[93].

Doit-on en déduire que la position de la CCJA est désormais fixée ? L’avenir nous le dira.

En attendant, on retiendra simplement que le droit OHADA n’est pas le seul système à adopter cette vision de l’ordre public international[94]. Le droit québécois par exemple a adopté depuis la réforme de 1994 un standard « d’ordre public » sans qualificatif en matière de reconnaissance des sentences arbitrales[95]. A propos, le Professeur Brierley dira que « Les deux types de sentences sont régis par l’ordre public québécois. (…) Les sentences étrangères et internes sont en principe, traitées sur un pied d’égalité »[96]. Il en est de même de l’Arbitration Act anglais qui, également partisan du monisme, ne mentionne pas l’épithète « international » pour parler de l’ordre public[97].

On en vient à se demander si cette solution ne dépend pas en réalité de la nature qu’on reconnaît à la sentence arbitrale. La sentence arbitrale, interne ou internationale n’est-elle pas un acte  « étranger », candidat à l’entrée dans l’ordre juridique étatique ?  Dans ce sens, même interne, elle reste un acte étranger de sorte que l’élément d’extranéité lui demeure en réalité congénital. Il s’agit, comme l’écrit A. Prujiner, « d’intégrer une décision privée dans un ordre juridique étatique afin  d’y bénéficier de l’usage de la force publique »[98]. Ce qui peut justifier le choix du législateur OHADA de ne pas distinguer entre arbitrage interne et arbitrage international dans le régime de contestation de validité de la sentence et de l’exequatur, que ce soit en arbitrage CCJA ou en arbitrage de droit commun.

En toute hypothèse, quand on sait, avec un grand nom de la doctrine africaine, que « le droit n’est pas de l’ordre des incantations » et qu’  « il est destiné à être compris afin d’être appliqué à des situations concrètes »[99], on peut regretter que la CCJA, malgré les occasions qui s’y prêtaient, n’ait pas apporté les précisions nécessaires à la clarification de sa position.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] L’auteur exprime ses vifs remerciements au Professeur Akuété Pedro SANTOS dont les conseils ont été précieux à l’aboutissement de cette œuvre. Il salue également la générosité de Me Martial AKAKPO qui y a apporté un significatif soutien documentaire.

[2] Les Etats des Caraïbes d’une part avec l’OHADAC (Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires dans les Caraïbes) et l’Europe d’autre part ont déjà mis en œuvre avec des fortunes diverses des processus inspirés du modèle de l’OHADA en vue de l’harmonisation de leurs droits  des affaires. Voir, pour l’Europe, Rapport sur l’élaboration d’un code européen des affaires, Valérie Gomez-Bassac, député du Var, entretien réalisé le 22/07/2019 par le Magazine Le Monde du Droit. www.lemondedudroit.fr. Site consulté le 03/06/2020. Pour les Caraïbes, consulter le site www.ohadac.com.

[3] Préambule et article 1er du Traité de l’OHADA.

[4] Pierre MEYER, OHADA, Droit de  l’arbitrage, Collection Droit uniforme africain, Bruylant-Bruxelles, n°400, p.236 : « La sentence arbitrale, quoiqu’obligatoire ne peut donner lieu à des mesures d’exécution forcée qui requièrent la mise en œuvre de la contrainte publique ». Dans ce sens, Civile 2ème, 5 juin 1996 : JCP 96, IV, 1704.

[5] L’expression arbitrage OHADA renvoie au système d’arbitrage mis en place par le dispositif OHADA à travers le Traité et les instruments OHADA relatifs à l’arbitrage. Voir Gaston KENFACK DOUAJNI, « Rapport de synthèse » in l’OHADA et les perspectives de l’arbitrage en Afrique, Bruylant-Bruxelles, 2000.

[6] Le législateur ne l’a pas défini. Le droit comparé nous révèle que cette réalité est largement partagée. Le code civil français par exemple, en son article  6 s’est contenté de faire référence à la notion comme une bulle impénétrable aux conventions particulières sans la définir.

[7] J-B RACINE, Droit de l’arbitrage, édition PUF, p.594, n°956.

[8] Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, 11ème édition, p.720.

[9] Gérard CORNU, op.cit.

[10] TERRE, SIMLER, LEQUETTE, CHENEDE, Droit Civil, Les obligations, 12ème édition, 2018, Dalloz, n°485, p. 560.

[11] Gaston KENFACK DOUAJNI, La notion d’ordre public international dans l’arbitrage OHADA, Revue Camerounaise de l’arbitrage, n°29, Avril-Mai-Juin 2005, p.3.

[12] La condition de la conformité à l’ordre public du jugement étranger pour son efficacité devant le for a été posée pour la première fois par l’arrêt Bulkley (Civile, 28 février 1860, Sirey 1860.1.210, concl. Dupin).

[13] Un auteur a rattaché à la notion le concept d’identité nationale. L’ordre public international serait réputé comprendre les principes auxquels il parait impossible de déroger, du fait que ces principes s’apparentent à des impératifs tenus pour essentiels au maintien de l’identité nationale d’un Etat. Jean ROBERT et Bertrand MORAU, Arbitrage international, Jur. Cl. Comm. 31 août 1989, n° 183.

[14] Pierre LALIVE, Ordre public transnational ou réellement international et arbitrage international, Revue de Droit de l’Arbitrage 1986, p. 329 et s.

[15] Pierre LALIVE, op.cit., p. 331.

[16] Un bel exemple de cette solution est fourni par la sentence rendue dans un arbitrage ad hoc Benteler c/ Etat Belge, le 18 novembre 1983, Journal des Tribunaux, Bruxelles, 1984. 230. Le législateur de l’OHADA consacrera cette règle dans l’article 2 alinéa 2 de l’AUA : « Les Etats, les autres collectivités publiques territoriales, les établissements publics et toute autre personne morale de droit public peuvent également être partie à un arbitrage, quelle que soit la nature juridique du contrat, sans pouvoir invoquer leur propre droit pour contester l’arbitrabilité d’un différend, leur capacité à compromettre ou la validité de la convention d’arbitrage ». Pour une application de ce principe dans la jurisprudence OHADA, voir CCJA, arrêt n°012/2011 du 29 novembre 2011, République de Guinée équatoriale et CEMAC C/ CBGE, Revue de l’ERSUMA 2018, n°9, p.177.

[17] Sentence CCI n°12.290 (2005), JDI 2010, p. 1406, obs. F.M.-S, citée par C. SERAGLINI et J. ORTSCHEIDT, Droit de l’arbitrage interne et international, Montchrestien, p. 816, n°896.

[18] Sentence rendue par Gunnar Lagergren, J.-G. Wetter, Issues of Corruption before International Tribunals : The Authentic Text and True Meaning of Gunnar Lagergren’s 1963 Award in ICC case n° 1110 : Arb. Int’l 1994, p. 2777 ; sent. CIRDI, 4 oct. 2006, World Duty Free Company c/ Kenya, ARB/00/7, n° 157 ; sur cette question V. J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l’ordre public : LGDJ, 1999, n° 710 à 718.

 

[19] En France, la distinction est claire depuis les années 60. Un arrêt de 1964 de la Cour de cassation reconnaissait la capacité de l’Etat français à compromettre dans des contrats internationaux alors que compromettre pour l’Etat français était contraire à son ordre public interne. Les juges avaient retenu en effet que «  si la prohibition résultant des articles 83 et 1004 du code de procédure civile est d’ordre public interne, elle   n’est pas d’ordre public international et ne met pas obstacle à ce qu’un établissement public soumette, comme pourrait le faire tout autre contractant, la convention de droit privé qu’il passe à une loi étrangère, admettant la validité de la clause compromissoire, lorsque ce contrat revêt le caractère d’un contrat international (…) ». Civile 1ère, 14 avril 1964, Rev. Cri. Dr. Intern. Privé 1967, p. 69. Cité par Stéphanie Cartier, op.cit., p. 248.

[20] J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, op.cit. n° 869. L’auteur précise que « là où une règle d’ordre public international est toujours une règle d’ordre public interne, une règle d’ordre public interne n’est pas nécessairement une règle d’ordre public international ».

[21] Voir sur la distinction entre ordre public international et ordre public interne en droit québécois, Jacques Béguin. Cet auteur définit l’ordre public interne comme suit : « C’est une loi impérieuse lorsque nul ne peut décider ou agir différemment. La loi est impérieuse. Un exemple entre mille : la monnaie a cours légal. On ne peut pas y contrevenir ». Au sujet de l’ordre public international, l’auteur poursuit : « La règle étrangère, normalement compétente, offre telle solution. Cette solution est rejetée par le système étatique considéré. Elle est rejetée parce qu’elle heurte l’ordre public international du système d’accueil…C’est la conception que les juges de l’Etat se font de l’ordre public international ». J. Béguin, L’arbitrage commercial international, Montréal, Centre de recherche de droit privé & comparé du Québec, 1987, p.97.

[22] Pierre MEYER, OHADA, Droit de l’Arbitrage, Collection Droit uniforme africain, Ed. Bruylant Bruxelles, page 257.

[23] Article V-2-b : « La reconnaissance et l’exécution d’une sentence arbitrale pourront aussi être refusées si l’autorité compétente du pays où la reconnaissance et l’exécution sont requises constate que la reconnaissance ou l’exécution de la sentence serait contraire à l’ordre public de ce pays ».

[24] Certains auteurs comme Jacques Béguin ont en effet soutenu que le fait que la Convention de New York n’accompagne pas l’expression « ordre public » du mot « international » ne signifie pas qu’elle fait référence à l’ordre public interne. Selon lui, « il s’agit bien évidemment de l’ordre public international, au sens de la législation de l’Etat d’accueil ». op. cit. p. 101.

[25] Le 23 novembre 2017, le Conseil des Ministres de l’OHADA a adopté deux nouveaux Actes uniformes, l’un relatif à l’arbitrage en substitution du texte du 11 mars 1999 relatif à cette matière, l’autre portant sur la médiation et a révisé le Règlement d’arbitrage de la CCJA.

 

[26] P. G. POUGOUE, « Le système d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage », in l’OHADA et les perspectives de l’arbitrage en Afrique, Travaux du Centre René Jean DUPUY pour le droit et le développement, vol.1, dir. FOUCHARD, Bruylant Bruxelles, 2000, p. 147.

[27] Pierre MEYER. Op.cit. Page 259.

[28] Article 1492-5° du Code de procédure civile français.

[29] Article 1520-5° du même code.

[30] Arbitration Act 1996, Chapter 23.

[31] J-B RACINE, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, op.cit., p. 440, n°789.

[32] Articles 29.2 du Règlement d’Arbitrage de la CCJA et 25 al.3 de l’AUA.

[33] Avant la réforme, seul le Règlement d’arbitrage avait prévu cette possibilité de renonciation des parties au recours en annulation de la sentence. Une telle clause, une fois librement convenue, n’avait aucune limite et rendait irrecevable tout recours en annulation de la sentence même si l’un des motifs d’annulation prévus à l’article 30.6 du Règlement d’arbitrage était établi. Néanmoins, il restait aux parties la faculté de faire opposition à l’ordonnance d’exequatur en dépit de la renonciation à tout recours contre la sentence. Ce recours est aujourd’hui supprimé (art. 30.4 du Règlement d’arbitrage). Pour une nette distinction entre le recours en contestation de la sentence et l’opposition à l’ordonnance d’exequatur, voir Martial Koffi AKAKPO, La protection de la partie faible dans l’arbitrage OHADA, préface de J-B RACINE, éd. L’Harmattan, 344-352.

[34] L’arbitrage de droit commun dans l’espace OHADA est celui fondé sur l’Acte uniforme relatif à l’arbitrage. Il se décline en deux facettes, arbitrage ad hoc et arbitrage institutionnel exclusion faite de l’arbitrage CCJA ; et s’oppose à ce dernier dont le régime est issu du Traité et du Règlement d’arbitrage de la CCJA.

 

[35] P. G. POUGOUE, op. cit. Note 26.

[36] Eugène Assepo ASSI, L’ordre public international dans l’acte uniforme de l’OHADA relatif à l’arbitrage, Ohadata D-09-02.

[37] Eugène Assepo ASSI, ibid.

[38] Articles 29 et 30 du Règlement d’arbitrage  réservent respectivement les procédures de contestation de validité et de l’exequatur de la sentence à la compétence de la Cour commune.

[39] Article 30 de l’AUA : « La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en vertu d’une décision d’exequatur rendue par le juge compétent dans l’Etat partie ». Ce texte n’a subi aucune modification après la réforme de 2017.

[40] Gaston KENFACK DOUAJNI, L’arbitrage OHADA, Collection droit OHADA et droits communautaires africains, page 87, n°366 ; Voir également Philippe LEBOULANGER, L’arbitrage et l’harmonisation du Droit des affaires en Afrique, Rev. Arb. , 1999,  p. 570-571.

[41] Ph. FOUCHARD, Rapport de synthèse in «  L’OHADA et les perspectives de l’arbitrage en Afrique », Bruylant-Bruxelles 2000, p. 239 et 240, cité par BEBOHI EBONGO Sylvie Ivonne, L’ordre public international des Etats parties à l’OHADA, Revue Camerounaise de l’Arbitrage, n° 34- Juillet-Aout – Septembre 2006, p.3.

[42] On ne peut pas non plus exclure la référence à l’ordre public international au profit de l’ordre public interne motif pris du caractère interne de l’arbitrage pour au moins deux raisons. La première, aussi bien dans le Traité que dans le Règlement d’arbitrage de la CCJA, le législateur de l’OHADA n’a visé que l’ordre public international lorsqu’il s’agit d’intégrer une sentence arbitrale CCJA dans l’ordre juridique spécifique d’un Etat. Le droit comparé est en faveur de ce point de vue, un arrêt de la Cour d’Appel de Paris ayant retenu en droit français que « la violation de l’ordre public interne, à la supposer établie, ne constitue pas un cas d’ouverture à l’appel de la décision accordant l’exécution en France d’une sentence arbitrale étrangère, l’article 1502, 5°, ne visant que le cas où la reconnaissance ou l’exécution de cette sentence sont contraires à l’ordre public international » (Paris, 12 mars 1985, Rev. arb. 1985. 299, note E. Loquin ; D. 1985. IR 467, obs. P. Julien). La deuxième est que la sentence CCJA munie de l’exequatur est exécutoire dans tous les Etats de l’espace OHADA selon les articles 25 du Traité et 27-1 du Règlement d’Arbitrage, sous la seule réserve de l’apposition de la formule exécutoire par l’organe compétent de chaque Etat qui en est tenu au vu de l’attestation d’exequatur. Le législateur ne saurait restreindre le champ de contrôle de la sentence à l’ordre public interne d’un Etat et faire rayonner au même moment le caractère exécutoire de cette sentence dans tout l’espace géographique de l’Organisation.

[43] On peut cependant s’interroger sur la capacité de la CCJA à appréhender l’ordre public au sens du droit international privé de chacun des Etats parties dans toute sa teneur. L’hypothèse est celle d’un arbitrage où l’ordre public à protéger est celui d’un Etat partie alors que les parties ont choisi l’arbitrage CCJA. A titre d’exemple, il lui est demandé d’exequaturer une sentence qui condamne un ressortissant d’un Etat partie à l’OHADA à exécuter un engagement qui a pour cause une liaison homosexuelle. En ces temps-ci où les frontières entre l’immoral et le moral sont très variables d’un pays à un autre, sans oublier les pressions des lobbies favorables à ces genres de relations, il n’est pas évident que la CCJA rende compte exactement de ce que la conscience morale de chaque société accepte ou n’accepte pas.

[44] Martial K. AKAKPO, op.cit., p.378. n°769.

[45] Idem, n°770.

[46] L’expression est de G. Kaufmann-Kholer, « Articles 190 et 191 LDIP : Les recours contre les sentences arbitrales », Bull. ASA. 1992, 64. Spéc., p.66 : « L’ordre public est le grief fourre-tout des plaideurs déçus », cité par J-B RACINE, arbitrage commercial international et ordre public, op.cit., p.441,  n°790.

[47] Stéphanie Cartier, L’arbitrage international au Québec : ordre public interne ou ordre public international ? Revue Québécoise de droit international, volume 11-1, 1998. Pp. 229-261.

[48] C’est la conception que semble partager le Professeur Pierre MEYER, Commentaire de l’acte uniforme sur l’arbitrage de 1999, OHADA, Traités et Actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2018, p. 179. Selon l’auteur, « la référence à l’ordre public international ne convient que pour l’arbitrage de droit international privé. Seul la réserve de l’ordre public interne doit trouver à s’appliquer lorsque l’arbitre tranche un litige interne. L’utilisation de l’expression « ordre public international » suppose donc un litige international au sens du droit international privé ». Nous reviendrons pour une critique de cette conception.

[49] Article 1er de l’AUA.

[50] Abdou DIALLO, Réflexion sur l’arbitrage dans l’espace OHADA, Thèse de Doctorat, Université de Perpignan Via Domitia, septembre 2016, Page 31. Selon l’auteur, « le législateur communautaire a choisi l’unité du régime juridique….Il n’opère aucune distinction entre arbitrage interne et international ».

[51] L’arbitrage international peut avoir deux sens. Au sens juridique, l’arbitrage est international lorsqu’il présente des éléments d’extranéité qui constituent des points de contact avec d’autres pays (la nationalité des parties, des arbitres, leurs domiciles respectifs, les lieux de conclusion ou d’exécution du contrat etc…). Dans son sens économique, est international l’arbitrage qui met en cause les intérêts du commerce international. Cette définition met en exergue l’objet du litige. Voir Gaston KENFACK DOUAJNI, L’arbitrage OHADA, droit OHADA et droits communautaires africains, 2014, pages 33-34.

[52]  Pierre MEYER, Droit de l’Arbitrage OHADA, Collection droit uniforme africain, Bruylant Bruxelles, p.44.

[53] Supra, notes 21 et 22.

[54] En droit français, la cour de cassation a eu à préciser à maintes reprises qu’il s’agit de l’ordre public international français qui s’entend de la conception française de l’ordre public, c’est à dire de l’ensemble des règles et des valeurs dont l’ordre juridique français ne peut souffrir la méconnaissance même dans des matières internationales. Civile 1ère, 15 mars 1988 : Rev. Arb. 1990, 115, note Idot ; Civile 1ère, 19 novembre 1991, pourvoi n°89-22.042 P : Rev. Arb. 1992. 76, note Idot.

[55] Pierre MEYER, op.cit., pp. 238-239. Le deuxième argume nt nous paraît peu convaincant, le juge national de l’exequatur pouvant également bien entendu accorder l’exequatur et dans ce cas, sa décision n’est susceptible d’aucun recours. 

[56] On retrouve le mot « manifestement » dans les articles 1488 et 1514 du code de procédure civile français respectivement pour l’arbitrage interne et international lorsqu’il s’agit de contrôler la conformité de la sentence à l’ordre public (international) avant la décision d’exequatur.

[57] Le droit français sur cet aspect parait plus cohérent. L’exigence du caractère « manifeste » de la contrariété de la sentence à l’ordre public dans le cadre de son contrôle par le juge de l’exequatur est prévue quel que soit le type d’arbitrage, interne ou international, institutionnel ou ad hoc. Elle se justifierait pas le caractère non-contradictoire de la procédure d’exequatur. « La partie qui a intérêt à s’opposer à l’exécution de la sentence n’étant pas appelée à ce stade à faire valoir ses moyens, la violation de l’ordre public doit être évidente ». J-B RACINE, Doit de l’arbitrage, op. cit., p. 593.

[58] Article 25 al. 6 de l’AUA et 32 du Règlement d’arbitrage de la CCJA.

[59] Remarquons que l’Etat du Bénin invoque aussi bien l’ordre public interne que l’ordre public international.

[60] CCJA, arrêt n°103/2015 du 15 octobre 2015, Société Bénin Control S.A. C/ Etat du Bénin, Revue de l’ERSUMA, 2018-2, n° 9, p. 211.

[61] En violation du principe de prohibition de la révision de la sentence au fond par le juge de l’exequatur ou du recours en annulation.

[62] CCJA, arrêt n°033/2015 du 23 avril 2015, Etat du Mali C/ Société groupe TOMOTA S.A., Revue de l’ERSUMA 2018-2, n°9, p. 198.

[63] Op.cit., page 257.

[64] Gaston KENFACK DOUAJNI, La notion d’ordre public international dans l’arbitrage OHADA, Revue camerounaise de l’Arbitrage n°29- Avril-Mai-Juin 2005, p.3. ; BEBOHI EBONGO Sylvie Ivonne, L’ordre public international des Etats parties à l’OHADA, Revue camerounaise de l’Arbitrage, n°34- Juillet-Aout-Sept. 2006, p.3.

[65] CCJA, arrêt n°4, 30 juin 2011, Affaire SONAPRA C/ SHB, ohadata J-12-137, Revue de l’ERSUMA, 2018-2, n°9, p.173.

[66] CCJA, arrêt n°104/2015 du 15 octobre 2015, Etat du Bénin C/ SCP et Patrice TALON, Revue de l’ERSUMA, 2018-2, n°9, p. 214.

[67] Arrêt n°103/2015 du 15 octobre 2015, supra note 58.

[68] CCJA, n°03 du 31 janvier 2011, Affaire PLANOR AFRIQUE C/ ATLANTIQUE TELECOM, Le Juris-Ohada n°2/2011, Avril-Juin 2011, p.8 ; Recueil de Jurisprudence de la CCJA, n°16, p.58.

[69] CCJA, n°68/2020 du 27 février 2020. Il ressort de cet arrêt que l’ordre public international s’oppose à ce qu’un arbitre statue à nouveau dans une même cause qui avait fait l’objet d’une décision exécutoire de la juridiction étatique sans que l’exception d’incompétence n’ait été soulevée. www.legiafrica.com. Consulté le 06/05/2020.

[70] CCJA,  CCJA n°020/2013 du 18 avril 2013. Affaire société HANN et Compagnie c/ société Générale de Banque de guinée dite SGBG, Juridata n°JO 27-04/2003.

[71] CCJA, arrêt n° 004/2011 du 30 juin 2011, SONAPRA C/ SHB, Revue de l’ERSUMA, 2018-2 n°9, p. 173.

[72] Il en est de même en Droit français où la jurisprudence considère de longue date que la sentence non motivée n’est pas, de ce seul fait, contraire à l’ordre public international (Civ. 1re, 22 nov. 1966, Gerstlé, JCP 1968. II. 15318, obs. H. Motulsky ; JDI 1967. 631, note B. Goldman ; Rev. crit. DIP 1967. 372, note P. Francescakis)

[73] CCJA, arrêt n°028/2007 du 19 juillet 2007, affaire NESTLE Sahel C/ SCIMAS, Revue de l’ERSUMA, 2018-2, n°9, p. 151.

[74] Gaston KENFACK, La notion d’ordre public international dans l’arbitrage OHADA, op.cit. ; BEBOHI EBONGO Sylvie Ivonne, op.cit.

[75] Article 26 AUA : « Le recours en annulation n’est recevable que….c) si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui a été confiée ;…f)  si la sentence arbitrale est dépourvue de toute motivation ».

[76] CCJA, Arrêt n° 099/2014 du 30 octobre 2014, SOGEFCO SA C/ AIRTEL CONGO, Revue de l’ERSUMA 2018-2, n°9, p. 193.

 

[77] CCJA, arrêt n° 45 du 17 juillet 2008, Revue de l’arbitrage 2010, p.595 et s., ohadata J-09-83.

[78] Pierre MEYER, Commentaires de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, OHADA, Traité et actes uniformes, commentés et annotés, Juriscope, 2018, p.180.

[79] Achille NGWANZA, L’essor de l’arbitrage international en Afrique sub-saharienne : Les apports de la CCJA, Revue de l’ERSUMA septembre 2013, n°3, pages 76-77 ; Gaston KENFACK, L’arbitrage OHADA, collection Droit OHADA et Droits communautaires africains op. cit. p. 87.

[80] Achille NGWANZA, op.cit. p.76.                                                                            

[81] Article 35 de l’AUA.

[82] Article 10 du Traité.

[83] Article 30 de l’AUA.

[84] « La reconnaissance et l’exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à une règle d’ordre public international ».

[85] Doit-on distinguer là où la loi n’a pas distingué ?

[86] La solution expose d’ailleurs les sentences à un plus grand risque d’annulation et de refus d’exequatur en raison du domaine plus vaste de l’ordre public interne.

[87] Pierre MEYER, op.cit. Note 46.

[88] Achille NGWANZA, op.cit. p.76. L’auteur écrit pertinemment que « Cette argumentation ne résiste pas à la critique car elle fait l’impasse sur l’ordre juridique OHADA qui supplante les ordres nationaux pour l’application du droit OHADA et au nom duquel l’ordre public international est le dénominateur commun  des règles impératives des Etats membres de l’OHADA ». Dans le même sens, un autre dira que « le système moniste retenue par le législateur OHADA est celui qui répond le mieux aux objectifs d’intégration économique et juridique ». Abdou DIALLO, Thèse précitée, Page 32.

[89] Le droit comparé nous renseigne que les pays dans lesquels cette solution est applicable ont adopté un régime dual de leur droit de l’arbitrage. C’est l’exemple de la France qui a bien distingué les règles applicable à l’arbitrage international de celles de l’arbitrage interne. Dans le code de procédure civile français, les articles 1442 à 1503 régissent l’arbitrage interne alors que l’arbitrage international trouve son siège dans les articles 1504 à 1527, même si certaines dispositions leur sont communes.

[90] C’est nous qui soulignons.

[91] Dans le même sens, Gaston KENFACK. L’arbitrage OHADA, op.cit. p. 34. « Comme on l’a relevé, l’AUA ne distingue pas entre arbitrage interne et arbitrage international ; ce qui réduit à leur strict minimum les éventuels problèmes susceptibles de résulter de la méthode conflictualiste ».

[92] Martial K. AKAKPO, op.cit., pp. 376 et 377.

[93] Voir note 64.

[94] Cette vision est souvent tributaire du choix du législateur dans le régime juridique de l’arbitrage en général. Les pays comme l’Angleterre et les Pays Bas ont choisi la dualité du régime (qui s’applique aux deux types d’arbitrage) alors que la France, la Suisse, le Danemark et l’Irlande ont choisi de séparer l’arbitrage interne et international.

[95] Article 949 du code de procédure civile québécois.

[96] J.E.C. Brierley, « Une loi nouvelle pour le Québec en matière d’arbitrage », 47 R. du B. 259, p. 269, cité par Stéphanie Cartier, op.cit. p.239.

[97] Martial Koffi AKAKPO, op.cit., page 375.

[98] A. PRUJINER, « Champ d’application du contrôle du juge national sur les sentences arbitrales internationales », in Competition and arbitration Law,  ICC Pub. No. 480/3, 1993, p. 283

[99] Professeur Komi WOLOU, A la recherche du sens des lois, Les Annales de l’Université de Parakou, Série "Droit et Science Politique", Vol.3 n°1 (2020), p. 76 et 78 : « La vocation de la loi est d’être appliquée à des situations concrètes, malgré son caractère général. Cette exigence impose que soit cerné le sens de la loi, préalable nécessaire au passage du droit au fait. On ne saurait appliquer la loi à une situation donnée sans comprendre avec précision ce qu’elle veut dire (…). Le droit n’est pas en effet de l’ordre des incantations ; il est destiné à être compris et à s’arrimer aux circonstances sans que soit éludée la mission qui lui est assignée ».

 

 

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